Titre , preface , Hortensius, partie 1 , partie 2
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P R E F A C E.Les Mathematiciens de la premiere opinion, voulans apprendre à leurs disciples la situation de la terre |
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& les mouvemens des corps celestes, suivant l'hypothese de la terre immobile, ont pour cest effect inventé diverses sortes d'instrumens, entre lesquels il n'y en a point de si parfaits que les Globes. Car ils representent en petite forme la terre & le ciel des estoiles fixes, selon leurs vrayes images, & font voir comme à l'oeil le lever & coucher apparent du Soleil, estoiles & signes celestes, & autres Phenomenes que les habitans de la terre remarquent au ciel. On ne sçait pas qui a premierement inventé les Globes, ni en quel temps; mais toutesfois il est certain que l'invention en est fort ancienne, & qu'ils ont esté en usage du temps d'Archimede, Proclus, & autres anciens escrivains. Mais en nostre siecle on les a amené à une plus grande perfection qu'ils ayent jamais eu auparavant; tant au regard du terrestre, qui a esté enrichi de plusieurs descriptions de pays nouvellement descouverts par les navigations des Castillans, Portugais, Hollandois, & Anglois; que du celeste, corrigé suivant les exactes dimensions des estoiles fixes, n'agueres faites par le tres-celebre Astronome Tycho Brahé. Or desirant qu'on peust aussi expliquer aux apprentifs de ceste science, les mouvemens celestes suivant la seconde opinion (fondée sur la vraye hypothese du monde, soustenuë par Copernicus) par la terre mobile; j'ay composé & mis en lumiere des nouvelles |
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Spheres, tant des cieux que de la terre, esquelles on void, comme en une vraye image du monde, l'ordre & les mouvemens des Spheres des Planetes, le triple mouvement de la terre, & comme de là procedent en effect le lever & coucher des flambeaux celestes, les changemens des saisons de l'année, les vicissitudes des jours & des nuicts, & autres telles choses. I'ay donc compris en ce livre, en deux parties distinctes, l'usage de ces instrumens là. En la premiere je traicte de l'usage des Globes vulgaires, par la terre immobile, suivant l'hypothese de Ptolemée; En la seconde l'usage des nouvelles Spheres, construites selon l'intention de Copernicus avec la terre mobile. I'ai suivi cest ordre, tant à cause que je voyois que l'opinion de Copernicus est plus difficile à comprendre que celle de Ptolemée, que les ignorans y trouvent moins de verisimilitude, & qu'elle requiert des meditations plus profondes; que pource qu'apres qu'on a bien compris celle de Ptolemée, on trouve moins de difficulté en ceste-ci. Ainsi ai-je estimé qu'il me falloit commencer par la description de l'usage des Globes vulgaires, afin qu'elle servist comme d'introduction à l'intelligence des Spheres de Copernicus. Au reste, si quelcun objecte, que ci-devant plusieurs excellens personnages ont mis en lumiere divers traictés de l'usage des Globes vulgaires, & pourtant que la premiere partie de ce livre semble superfluë; |
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Ie confesse bien que cela est vrai; mais toutesfois deux raisons m'ont incité à escrire derechef de ce sujet. La premiere & principale est, que j'ai voulu monstrer, que tout ce qui se propose & qui se fait par le moyen des Globes vulgaires, se peut accomplir de mesme par les Spheres construictes selon l'intention de Copernicus; (à quoy les susdits livres, pour la pluspart entremeslez de discours appartenans à d'autres parties d'Astronomie, n'estoyent pas si commodes) & pourtant j'ai traicté les mesmes problemes en chacune de ces parties, & m'y suis servi de mesmes exemples. L'autre cause est, que pour la mesme raison j'ai voulu traicter de quelques choses plus au long, & y en a adjouster d'autres qu'ils avoyent omises; & insistant sur le seul usage des Globes, laisser à mon escient ce qui n'appartient pas proprement à ce sujet. Car comme en vain on presenteroit quelque escrit à lire, à celui qui ne cognoistroit point les lettres; ainsi est-ce hors de propos de proposer à quelcun qui ne sçait pas encore l'usage des Globes (qui sont comme les elemens & alphabet de l'Astronomie) des plus hauts poincts; veu qu'une telle methode a plustost accoustumé de destourner les apprentifs, que de les aider en la cognoissance de ceste tres-agreable & tres-utile science. Quant aux raisons pour lesquelles on croid que l'hypothese du monde, qui veut que la terre soit mobile, |
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est conforme à la nature, non point celle qui tient qu'elle est immobile; je les ai touché seulement en deux ou trois mots, pource que cela n'appartenoit pas à mon dessein, & que d'autres en ont desja suffisamment traicté. Celui qui desire d'en avoir la cognoissance, pourra s'addresser à ce qu'en ont escrit, outre plusieurs autres, deux tres-renommez Mathematiciens Simon Stevin & Philippe Lansbergius; cestui-là briefvement & solidement tout ensemble en ses Memoires Mathematiques, en la premiere proposition du troisiéme livre, touchant le mouvement du ciel [^]; mais cestui-ci plus au long en ses Discours du mouvement journalier & annuel de la terre [^]. Quiconque n'a point l'esprit preoccupé de prejugez, & cede volontiers à la raison, trouvera en ces auteurs là une suffisante demonstration de ceste opinion, & une ample matiere pour refuter tout ce qu'on a accoustumé d'alleguer à l'encontre. Cependant, ami Lecteur, prenez mon labeur en bonne part, & en jugez avec sincerité. A Dieu. GVILLAUME I. BLAEV. |
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Mi Lecteur, ce qu'Anaxagoras a autrefois elegamment dit, que la main est cause de sapience, se trouve vrai, non seulement és autres choses, mais aussi principalement en ceste partie de la Philosophie, qui traicte des corps celestes, & recherche les mouvemens des astres esloignés de nous d'une immense distance. Car combien que l'entendement humain soit si excellent qu'ayant veuë pour guide, & la raison pour compagne, il puisse sans grande difficulté voler jusques au ciel, avec ces deux aisles de Platon, l'Arithmetique & la Geometrie, & là observer, comme s'il estoit present, les admirables revolutions des estoiles; toutefois il arrive presque ordinairement, qu'il n'en peut acquerir aucune science certaine sans l'aide des mains, ni expliquer aux autres la maniere des mouvemens celestes sans avoir continuellement devant ses yeux des instrumens qui lui representent la figure du ciel. Et pour ceste cause voyons nous que de toute antiquité des excellens personnages se sont soigneusement addonnés à exprimer avec des instrumens mechaniques les preceptes de l'Astronomie, & les loix des mouvemens celestes qu'ils avoyent appris par plusieurs observations; s'estudians de proposer aux nouveaux apprentifs en une maniere visible & palpable les secrets de ceste science, dans lesquels ils avoyent penetré par la force & subtilité de leur esprit, confermée par une longue experience. Or entre tous les instrumens Astronomiques qui servent à representer les mouvemens des corps celestes, il n'y en a point de plus simple, ni de plus accommodé à la capacité des apprentifs de ceste science que le Globe ou Sphere celeste, qui fait voir à l'oeil par des cercles materiels, ce que les Astronomes enseignent qu'il faut concevoir au ciel par des cercles imaginaires; & fait |
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toucher à la main, sans se beaucoup travailler l'esprit, les mouvemens des astres que les ignorans ont de la peine à comprendre. Les Astronomes considerans ceste commodité, n'ont pas seulement eu soin de faire construire mechaniquement des Spheres celestes, qu'on peust tousjours avoir en main pour s'en servir; mais aussi ont composé divers escrits de leur usage. On n'est pas bien asseuré qui est celui d'entre les anciens qui a le premier inventé la Sphere. Pline le rapporte à Atlas, Diogenes Laërtius à Musee, d'autres à Anaximander Milesien. Ciceron à Archimede & Posidonius; mais tous sans donner aucune asseurance de leur dire, sinon qu'on en veüille excepter Archimede & Posidonius; desquels toutesfois il est difficile de persuader à aucun entendu en ceste matiere, qu'ils ayent esté les premiers inventeurs de la Sphere. Or quant à la construction de la Sphere, ce n'a pas esté une chose si difficile; car on pouvoit tirer de la Geometrie la nature & proprieté des cercles celestes. Mais il y a eu beaucoup plus de peine, & par consequent plus de loüange, à disposer les estoiles sur le Globe celeste en mesme ordre & mesures qu'elles ont au ciel. Or soit que quelcun des anciens Astronomes, ait entrepris cest ouvrage, ou non, il est certain que personne n'en est venu à bout devant Hipparchus, ce grand conseiller de la nature, que Ptolemée & Pline ne se peuvent rassasier de loüer. Car icelui, comme tesmoigne Pline en son histoire naturelle liv. 2. chap. 26. a remarqué une nouvelle estoile, engendrée de son temps; & prenant garde à son mouvement le jour qu'elle apparoissoit, a esté induit à douter si cela arrivoit souvent, & si les estoiles que nous estimons estre fixes, n'omt point aussi de mouvement. Il a osé entreprendre une chose qui eust mesme esté penible à Dieu, a sçavoir de laisser à la posterité un Catalogue des estoiles, & de les mesurer à la reigle, ayant inventé des instrumens, par le moyen desquels il marquoit le lieu & grandeur de chacune; afin que par là on peust facilement discerner, non seulement si elles estoyent sujettes aux loix de mourir & de naistre, mais aussi s'il y en avoit quelcune qui changeast de place; Item, si elles croissoyent ou decroissoyent; ayant laissé le ciel en heritage |
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à tous, s'il se trouvoit quelcun qui en peust comprendre la raison. Hipparque*) donc a dressé un Catalogue des estoiles fixes, afin qu'à l'aide d'icelui on peust en tout temps construire des images des astres conformes aux celestes, & les depeindre sur un corps Spherique; lequel Catalogue se trouve encor aujourd'hui en l'Almageste°) de Ptolemée. Regiomontanus, Schonerus & autres s'en sont servi pour bastir des Globes celestes; mais à dire vrai, cela ne leur a pas fort heureusement reüssi, pource que le Catalogue d'Hipparchus n'a pas esté dressé avec ceste exacte diligence, qui est requise en la dimension des corps celestes. A ceux-là a succedé Gemme Frison, celebre Mathematicien en son temps, qui avoit dessein de mettre en lumiere des nouveaux Globes corrigez suivant les observations qu'il faisoit avec son Baston de Iacob; mais estant prevenu par la mort, il n'en est pas peu venir à bout. Apres lui Gerard Mercator, tres-docte Geographe, a aussi mis en lumiere un Globe celeste, basti tellement quellement sur l'ancien Catalogue. Mais les Globes celestes n'ont pas peu arriver à leur perfection devant que le tres-noble Tycho Brahé, second Hipparque de son siecle, incité aussi par l'occasion que lui donnoit la naisance d'une nouvelle estoile au signe de Cassiopée, l'an 1572, a dressé & publié un nouveau Catalogue des estoiles fixes. Car peu de temps apres que ce Catalogue a veu le jour, le Sieur Guillaume Blaeu, auteur de ce traicté, personnage tres-celebre, & des plus versez en la Cosmographie & és Mechaniques, a construit & mis en lumiere des Globes celestes de diverse grandeur, qui sont tres-exacts & beaucoup plus parfaits qu'il ne s'en estoit encor veu, ni entre les anciens ni entre les nouveaux Astronomes; à raison dequoy l'Astronomie & la Geographie lui sont grandement obligées. D'autres, comme il arrive, ont entrepris puis apres à son exemple de faire des nouvelles editions des Globes celestes; mais qui ne sont point si propres & exactes que les siennes. Or comme la construction des Globes celestes a esté seulement en nostre siecle amenée à sa derniere perfection; ainsi leur usage n'avoit jamais auparavant esté si exactement expliqué. Plusieurs ont bien enseigné la doctrine de la Sphere par les triangles, comme Ptolemée, Copernicus,
[ *) V. Gysembergh, P. J. Williams, E. Zingg, 'New evidence for Hipparchus' Star Catalogue revealed by multispectral imaging', Journal for the History of Astronomy, 53-4, 2022.] [ °) 'Kl. Ptolemaiou Megalès suntaxeôs' (Bas. 1538), p. 172-201 (μηκος - longitude, πλατος - latitude, μεγεθος - magnitude). Aide à lire: Schmidhauser, Renaissance Greek with Ligatures (voir Charts); Estienne, Alphabetum graecum, 1528. Ed. Heiberg, pars II, 1903, p. 38; Engl. (transl. G. J. Toomer) 1984, p. 342.] |
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Regiomontanus, Maginus, Pitiscus, Longomontanus, & autres; mais on s'est mis fort tard à traicter de l'usage & practique des Globes. Car je ne sçai si on en pourroit trouver seulement quelque trace entre les Arabes. Quant aux Europeens Appian & Schonerus ont esté presque les premiers; apres eux est venu Gemme Frison; & finalement en nostre siecle Robert Hues; & sur tout Adrian Metius, tres-renommé Professeur és Mathematiques en l'Academie de Franeker. Mais le Sieur Blaeu, que j'ai n'agueres nommé, ne leur a point cedé en diligence à illustrer ceste doctrine. Car apres avoir construit & mis en lumiere diverses Spheres & Globes celestes, ne se contentant point d'avoir ainsi obligé les amateurs des Mathematiques, il a encor voulu faire davantage pour l'avancement de leurs estudes, adjoustant à ses precedens labeurs sur les Globes une pleine & suffisante explication de leur usage. Ce qu'il a fait avec une telle diligence & d'un stile si familier, que celui qui aura seulement gousté du bout des lévres les premiers rudimens de ceste doctrine, pourra de soi mesme, à l'aide de cest escrit, en acquerir sans difficulté une parfaite cognoissance. Au reste, les Globes & Spheres celestes qui jusqu'à present ont veu le jour, ont tous esté accommodez à la vulgaire, & ancienne opinion de l'hypothese du monde, qui porte que la terre est immobile au centre de l'univers, & que le Soleil avec les estoiles fixes se meuvent autour d'elle; & ont aussi esté appellez Ptolemaïques, pource que Ptolemée, avec plusieurs autres Astronomes, tant anciens que modernes, a suivi & tenu pour vraye ceste hypothese. Mais veu qu'il y a aujourd'hui encor une autre opinion de la disposition & agencement des parties du monde, portant que le Soleil se repose au centre de l'univers, & que la terre se meut à l'entour d'icelui, laquelle a esté renouvellée le siecle passé par Copernicus (car elle n'est pas moins ancienne que la precedente, ayant autresfois esté tenuë par Aristarque Samien, & par les Pythagoriciens) c'est de merveille qu'entre tant d'excellens ouvriers qui se sont exercez en ce sujet, il ne s'en est trouvé aucun qui ait entrepris de construire une Sphere selon l'intention de Copernicus, & de la mettre en lumiere pour l'avancement |
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des estudes d'Astronomie. Car si cela eust esté fait, on n'eust pas rejetté, comme absurde, l'opinion de Copernicus, devant qu'on eust veu comment elle sert à la demonstration des Phenomenes, c'est à dire de ce qui apparoist au ciel, & combien il y a de choses qui se font par icelle plus probablement & plus briefvement, que par l'autre. Or maintenant pource que Copernicus est trop obscur en ses escrits pour estre entendu de tous, & qu'aucun Astronome n'a encor expliqué populairement l'usage de la Sphere & hypothese de Copernicus, il est arrivé que plusieurs preoccupez de prejugez, ont condamné comme faux ce qu'ils n'entendoyent pas, & adherans à la seule Sphere de Ptolemée, se sont privez soi mesmes & autres de la douceur de ces tres-agreables contemplations. On a bien debattu au long la controverse du mouvement ou repos de la terre, mais sans que les lecteurs moins experimentez en ayent peu recevoir grand fruict, à cause du defaut des instrumens. Mais veu que c'est une chose digne de recherche, si (comme parle Seneque) Dieu tourne touts les choses à l'entour de nous, ou bien s'il nous tourne nous mesmes*); ne falloit-il pas que tous les juges qui se sont voulu mesler d'en prononcer, fussent premierement informez de l'hypothese mesme & de ses effects, & lors venir à l'examen des argumens qu'on apporte pour sa defense? Or cela n'a peu estre fait qu'en publiant une Sphere manuele de Copernicus, en laquelle on contemplast à l'oeil tous les mouvemens qui resultent de ceste hyppothese du monde. Pourtant le Sieur Blaeu doit estre reputé digne d'une tres-grande loüange, de ce qu'il n'a point voulu permettre que ceste controverse fust plus long temps agitée à l'incertain, ains a presenté à l'examen des yeux & de la main, ce dont les Astronomes disputent aujourd'hui de bouche & par escrit; ayant pour cest effect constriut deux Spheres de Copernicus, l'une Generale, l'autre Particuliere. En la Generale, il represente la disposition du monde selon l'opinion de Copernicus, en laquelle le Soleil demeure immobile au centre; & la terre enclose avec la Lune entre les Spheres de Mars & de Venus, fait son tour en l'Ecliptique en l'espace d'un an. La derniere & plus haute Sphere de toutes, est celle des estoiles fixes, qui est aussi immobile & enclos en soi tout
[ *) Seneca, Quaestiones Naturales, VII, 2.3.] |
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cest univers. En la Particuliere il propose le mouvement journalier de la terre autour de son aissieu, & l'annuel par l'Ecliptique; y monstrant aussi comme l'aissieu de la terre est tousjours tourné vers une mesme contrée du ciel; d'où on peut pareillement observer sans difficulté la reflexion de l'aissieu, ainsi que l'appelle Copernicus, & la precession des equinoxes qui en depend. Par la Generale est monstrée la situation des Spheres celestes, les stations, retrograddations & directions des Planetes, & autres apparences que cause le mouvement de la terre en l'Ecliptique; Mais par la Particuliere la variation des saisons de l'année, le lever & coucher des astres, &c. Et ce avec une si grande dexterité & industrie, que j'ose bien dire que dés le temps d'Archimede jusquà present, le monde n'a point veu de telles Spheres. Il a aussi adjousté la solution par ceste Sphere de tous les problemes Spheriques, qu'on a accoustumé de soudre par celle de Ptolemée; tant afin d'apporter par ceste varieté plus de plaisir au lecteur desireux d'apprendre; que principalement pour faire voir que tout ce qui se demonstre en l'hypothese de Ptolemée par le repos de la terre, peut aussi estre demonstré, & beaucoup plus elegamment par l'hypothese de Copernicus; & pourtant que ce que Ptolemée dit au liv. 1. de son Almag. chap. 7. est tres-veritable, à sçavoir, que l'une des dispositions du monde ne differe rien du tout de l'autre, quant aux apparences, selon la plus simple consideration*). Ie ne dira rien ici davantage de l'hypothese de Copernicus. Ie voudrois que tous prissent la peine de considerer attentivement la chose, devant que d'en juger; & qu'ils n'estimassent point, sans avoir premierement bien pesé les raisons que ceste opinion apporte pour sa defense, qu'elle merite d'estre rejettée, pource qu'elle est odieuse, & que le vulgaire la tient pour absurde. Que s'il y en a quelques-uns, qui, à cause de la sentence qui a n'agueres esté donnée contre ceste hypothese, cuident qu'il la faille condamner du tout; j'estime toutesfois qu'ils seront plus equitables, que de rejetter pourtant les Spheres mesmes; veu qu'elles representent nuëment ceste hypothese, sans se mettre en peine de sa verité ou fausseté, & qu'en demonstrant hypothetiquement (ce qui suffit)
[ *) 'Kl. Ptolemaiou Megales suntaxeos : bibl. 13' (1538), p. 6, r. 23: "κατα την απλουσεραν επιβολην". Cf. Lansbergen (1630), p. 2.] |
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que les apparences celestes se peuvent aussi bien resoudre par ceste façon de Spheres, que par les autres, voire plus commodément en quelques chefs, elles ne laisseront pas d'apporter une singuliere utilité a tous les Astronomes qui dependent de ceste ordonnance, qui condamne l'opinion du mouvement de la terre. A Dieu.
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[ Cf. globe dans: Joh. Schöner, Globi stelliferi, sive sphaerae stellarum fixarum usus ..., Norimb. 1533. Globe terrestre sur p. de titre de: Apianus/Frisius, Cosmographicus liber, 1533 avec 'gnomo sphaericu[s]' (mentionné par Schöner, Cap. VIII).] |
A R G V M E N TDe la premiere partie.Ceste partie contient deux livres,
Le second, de leurs divers usages.
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P R E M I E R E P A R T I E.L I V R E P R E M I E R.De laC O M P O S I T I O NE TP A R T I E SD E S G L O B E S. |
A R G V M E N Tdu premier livre.De laC O M P O S I T I O N & P A R T I E S D E S G L O B E S, Compris en huict Chapitres.
Le second, des Cercles du Globe celeste. Le troisiéme, des Cercles du Globe terrestre. Le quatriéme, de la diverse distinction des pays. Le cinquiéme, des estoiles, & de leurs differences, nom, & division. Le sixiéme, du mouvement de la Sphere des estoiles fixes, à l'entour de l'Aissieu du Zodiaque. Le septiéme, du mouvement du Soleil en l'Ecliptique. Le huictiéme, de l'Horizon.
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Des Cercles qui sont au dehors des Globes, & sont communs à l'un & à l'autre. I. Que c'est qu'un Globe. E Globe ou la Sphere, comme la definissent les Mathematiciens, est un corps rond, compris d'une seule superficie, au milieu duquel il y a un poinct, duquel toutes les lignes droites qu'on tire à la circonference exterieure, sont esgales entr'elles. Les Astronomes ont accoustumé de representer en deux tels Globes, cest admirable ouvrage de Dieu, qu'on appelle le Monde, par une petite image, mais conforme, tout de mesme que les Architectes representent en un petit modelle, un grand bastiment. Or je di par une image conforme, non seulement pour ce qu'ils ressemblent en rondeur au ciel & à la terre; mais principalement pource qu'en l'un est representé comme au vif le Ciel avec les Astres qu'il contient, en leur vrai ordre & situation, & distinction de leur grandeur apparente; en l'autre la Terre, avec tous ses pays, isles & mers. Afin de proposer exactement toutes ces choses, & les representer à la veuë, ils ont inventé avec une diligente consideration, divers cercles, grands & petits, tant hors des Globes, qu'en leur superficie. Or les grands cercles sont ceux qui ont un mesme centre avec la Sphere, & qui estants tirez par le milieu de sa circonference, la coupent en deux parties esgales, de mesme qu'ils se divident aussi les uns les autres. Les moindres sont ceux qui ont un autre centre que la Sphere; & qui la divisent en deux parties inesgales. Mais pource qu'à peine se peut-il faire, qu'aucun comprenne bien la difference de ces cercles, & moins encore leur usage tant au Globe celeste, qu'au terrestre, |
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sans en avoir auparavant quelque cognoissance; il nous les faut descrire tous à part, & premierement ceux qui estans considerez hors de la Sphere, sont communs à l'une & à l'autre; & puis ceux de la superficie de la Sphere, qui sont propres à chacune.
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[ 3 ]
Pource que ci apres nous nous servirons souvent de ces mots vers ou sous le Meridien, par iceux nous entendons son costé Oriental, auquel est ladite division par degrés, & qui convient avec le milieu de l'Aissieu. Ce dont j'ai voulu advertir ici une fois pour toutes, de peur d'ennuyer le Lecteur par une frequente repetition.
Apres ceste premiere division suivent les noms des vents, & ce en deux façons; car premierement il y en a douze [^], distinguez par les noms que les Grecs & Latins leur ont donné autrefois; puis apres il y en a trente deux, selon ce que les mariniers les appellent aujourd'hui, lesquels se servent de noms Allemands ou Flamends. Vers le bord de dehors il y a deux Calendriers Romains, à sçavoir le Calendrier Iulien suivant le viel style, & le Gregorien qui observe le nouveau, & est ainsi appellé du Pape Gregoire XIII qui l'a corrigé & reformé. Entre ces deux Calendriers sont marquez les douze signes du Zodiaque avec leurs |
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dergrés & characteres propres. Les mois des Calendriers sont distinguez par jours, ausquels on a adjousté les sept premiers lettres de l'Alphabet Romain, pour discerner les jours de la semaine, selon la diversité de la lettre Dominicale. [^] En quelques Globes les douze signes du Zodiaque avec le Calendrier, sont au bord interieur de ce cercle de bois, & les vents en l'exterieur, mais si on regarde à l'usage, tout revient à un. Au bord de dedans il y a deux fentes ou entailleures, par lesquelles le Meridien, dont le costé qui est divisé en degrés directement respond au Septentrion & le Midi, descend jusqu'à une telle profondeur, que precisément une moitié dudit Meridien & du Globe, est au dessus de la superficie de ce cercle de bois, & l'autre est cachée au dessous; Ceste partie là nous represente l'Hemisphere du ciel que nous voyons, & ceste-ci, celui que nous ne voyons point. Or on appelle ce cercle de bois Horizon, d'un mot Grec, qui signifie Borner, pource qu'il borne nostre veuë, de mesme que le vrai Horizon qui separe l'Hemisphere du ciel que nous voyons, d'avec celui que nous ne voyons point. En la base de dessous il y a un petit pied de bois, où est aussi une entailleure, afin que par icelle le Meridien & le Globe, puisse sans varier estre abbaissé & eslevé à diverses elevations du Pole, selon qu'il sera de besoin.
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[ 5 ]
les parties du cercle horaire, quand on tourne le Globe à l'entour de ses Poles au Meridien; & aussi peut estre appliquée à telles heures qu'on voudra, sans que le Globe bouge de sa place.
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[ 7 ]
Zodiaque, à cause de la grande convenance qu'il a avec le Zodiaque. Car ils conviennent en ceci, qu'ils ont un mesme Aissieu & mesmes Poles; & n'y a que ceste seule difference, que l'Ecliptique est un cercle sans largeur au milieu du Zodiaque, & le Zodiaque est un cercle ou plustost une Zone ou ceinture, ayant presque 20 degrés de largeur, à sçavoir presque 10 degrés de chasque costé de l'Ecliptique. Les Planetes font perpetuellement leurs mouvemens sous icelui, declinans de l'Ecliptique, tantost vers le Septentrion, tantost vers le Midi. Mais pource que nous n'avons pas affaire au Globe de la largeur du Zodiaque de 20 degrés, on n'y depeinct que la seule Ecliptique.
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[ 8 ]
les plus esloignez de l'Equinoctial, on appelle Solstice d'Esté celui qui tire vers le Septentrion, & Solstice d'Hyver celui qui tire vers le Midi. On leur donne ce nom à cause que quand le Soleil est parvenu à ces poincts là, il semble qu'il s'arreste, & cesse de s'esloigner de l'Equateur vers l'un ou l'autre Pole du monde. L'Ecliptique est divisée en douze parties esgales, qu'on appelle Signes, & prennent leur nom de la constellation prochaine. Or ils commencent à l'Equinoxe du Printemps, & vont d'Occident en Orient; en voici les noms & characteres, comme ils sont representez au Globe. |
Aries, | Taurus, | Gemini, | Cancer, | Leo, | Virgo. |
Libra, | Scorpius, | Sagittarius, | Capricornus, | Aquarius, | Pisces. |
Les trois premiers signes commencent à l'Equinoxe du Printemps, & montent de l'Equinoctial vers le Septentrion, jusqu'au Solstice d'Esté. Les trois suivans commencent à Cancer, & descendent derechef vers l'Equinoctial, jusqu'à l'Equinoxe d'Automne. La troisiéme rangée de signes commence à Libra, & descend vers le Midi jusqu'au Solstice d'Hyver. La quatriéme rangée commence à Capricorne, & tend derechef vers l'Equateur, & finit à l'Equinoxe du Printemps, ou bien au commencement d'Aries. Chasque signe est divisé en 30 degrés, de sorte que toute l'Ecliptique contient 360 degrés comme les autres cercles.
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[ 9 ]
cercles. Le premier passe par les commencemens d'Aries & de Libra, & monstre le commencement de la longitude de ces signes; Le second passe par les commencemens de Taurus & de Scorpius; & ainsi des autres, divisans toute la superficie du Globe en douze parties esgales, qui sont tres-larges en l'Ecliptique, & de là vont en s'estrescissant de plus en plus vers les Poles du Zodiaque, jusqu'à tant qu'elles viennent en pointe à ces Poles du Zodiaque, & s'y perdent. La superficie entiere de chacune de ces parties porte le nom du signe contenu en l'Ecliptique entre deux demicercles: Par exemple, la superficie qui est entre les deux demicercles, qui passent par les commencemens d'Aries & de Taurus, contenant le signe d'Aries en l'Ecliptique, est aussi appellé le signe d'Aries, & toutes les estoiles & Planetes, ou autres poincts du ciel, compris entre ces deux demi cercles, de costé & d'autre de l'Ecliptique jusqu'au Poles, sont dits estre au signe d'Aries. Et ainsi des autres.
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[ 10 ]
Deux petits cercles, qu'on appelle Polaires, sont descrits des Poles du Zodiaque par la revolution journaliere du ciel, à l'entour des Poles du monde, en mesme distance qu'il y a des Tropiques à l'Equinoctial. Celui qui est tiré à l'entour du Pole Septentrional s'appelle cercle Arctique, d'un mot Grec qui signifie une Ourse, à cause des constellations voisines des deux Ourses; l'autre qui est à l'entour du Pole Meridional s'appelle Antarctique, c'est à dire opposé à l'Arctique.
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[ 11 ]
celestes, que les Astrologues ont accoustumé de distinguer par six Cercles de position, comme on le peut voir en leurs escrits.
C H A P. I I I. Des Cercles du Globe terrestre. I. De l'Equateur terrestre.
Des deux costez de l'Equateur, & en parallele avec luy, on tire derechef, ou de fait, ou par imagination, 99 [89] cercles, esloignez les uns des autres de la distance d'un degré, jusqu'aux |
[ 12 ]
Poles, lesquels Cercles on appelle Parallels ou Cercles de latitude. Mais afin que les places des villes & pays ne fussent trop broüillées & obscurcies au Globe, nous n'avons accoustumé de descrire tant les Meridiens que les Parallels, que par chasque dixaine de degrés en l'Equateur ou au Meridien. & Antarctique.
C H A P. I V. De la diverse division des pays. I. De la division en longitude & latitude.
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& est de deux sortes, l'une Septentrionale, és lieux qui s'esloignent de l'Equateur vers le Septentrion; l'autre Meridionale és lieux qui tendent dudit Equateur vers le Midi. Il y a une grande diversité entre les Geographes modernes à mettre le commencement de la longitude des lieux; pourtant il m'a semblé que ce ne seroit point hors de propos de mettre ici, ce que Simon Stevin celebre Mathematicien à escrit & jugé de cest affaire, en la quatriéme definition [^] de son premier livre de Geographie. Les Geographes de ce temps, dit-il, ne sont pas d'accord entr'eux, à prendre le commencement de la longitude, & le premier Meridien, dont on doit conter les autres; Car les uns suivent Ptolemée qui le met és Canaries; les autres prennent garde où l'aiguille touchée de l'aymant monstre tout droict vers le Nord, qu'on apperçoit premierement en navigeant des Canaries vers l'Occident; en quoi aussi ils sont de fort differens advis. [Car ceux-ci mettent le premier Meridien és Isles de Saincte Marie & de Sainct Michiel, qui sont les plus Orientales des Isles Flamendes; ceux-là és plus Occidentales, comme sont Corvo & Flores; les autres autrement.] D'où il arrive qu'il y a une grande difference à poser la longitude des lieux, si on ne declare aussi d'où l'on prend son commencement. Parant la chose mesme semble requerir, (afin que les Geographes s'entendent mieux les uns les autres, & evitent les erreurs) qu'on establisse un commun & ferme commencement. Mais il ne s'en faut pas remettre à la Boussole, car veu qu'elle ne suit pas un mesme Meridien, en suivant les observations faictes en diverses latitudes, on prend divers Meridiens pour les premiers. Davantage, les observations que plusieurs font en un mesme lieu, ne peuvent estre si exactes, qu'il n'y ait bien une minute de difference, qui revient à 3000 pas communs. Puis donc que la Boussole ne nous apprend rien de certain, la raison veut qu'on choisisse pour cest effect un lieu de la terre du tout ferme & arresté. Et puis que Ptolemée a dedié à cest usage l'une des sept Canaries, qu'il appelle Iuno, il est raisonnable de ne s'en departir point. Mais pource aussi que les endroits d'une mesme Isle different entre eux en longitude, il faut choisir une certaine |
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Isle, & en icelle un petit lieu, mais remarquable, & comme perpetuel, qui n'apporte pas une seule minute de difference. Car veu qu'on recherche exactement & scrupuleusement les longitudes des lieux & des villes jusqu'à une minute, il est du tout necessaire que le commencement dont on les conte, ne varie pas mesme d'une seule minute. Pour ceste fin nous avons pris le Pico de Teide, qui est un rocher, lequel ne va pas petit à petit en montant comme beaucoup d'autres, mais qui est eslevé tout droit ainsi qu'une grande bute, estant embas d'une assez grande estenduë, au milieu allant en s'estrescissant, jusqu'à tant que le sommet s'esleve en pointe semblable à un pain de sucre. Il est en l'isle de Teneriffe, qui est la plus grande, la plus riche & la plus excellente des sept Canaries. Si quelcun sçait un autre lieu au monde plus propre que cestui-ci, il sera à propos de le choisir. Mais en quelque sorte que l'affaire aille, il est du tout necessaire d'eviter ceste ambiguité là. Or afin de faire accorder les Globes terrestres & Chartes Geographiques, qui ont esté dressées sur un autre commencement de longitude, avec ceux qui suivent cestui-ci; il faut oster autant de degrés des longitudes des lieux qu'on a par ce moyen, que leur premier Meridien est plus Occidental que celui qui passe par la montagne de Pico en l'isle de Teneriffe. Par exemple; la ville de Rome en nostre grand Globe terrestre, suivant ceste position, est située en longitude presque de 31 degrés; mais au Globe qui prend le commencement de la longitude du Meridien qui passe par les Isles de Corve & de Flores, elle a 45 degrés 2/3 de longitude. Si donc vous ostez de ceste longitude 14 degrés 2/3 , dont le Meridien de ces isles est plus Occidental que celuy de Teneriffe, il restera 31 degrés, autant qu'elle en a suivant nostre position. Le mesme doit estre observé en tous les autres lieux. Les anciens Geographes ont partagé le Globe terrestre en Zones, Climats, & Parallels; Car comme le ciel est divisé en cinq |
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parties par le moyen des quatre moindres Cercles, qui sont le Tropique de Cancer, le Tropique de Capricorne, le Cercle Arctique & Antarctique; ainsi ont ils divisé le Globe de la terre par les mesmes cercles, qu'ils ont conceu au dessous des celestes & proportionels à iceux, en cinq parties qu'ils ont appellé en Grec Zones, c'est à dire bandes ou ceintures. La premiere Zone est contenuë entre les deux Tropiques, & l'Equateur la partage par le milieu: la seconde est contenuë entre les Tropiques de Cancer & le Cercle Arctique; la troisiéme entre le Tropique de Capricorne & le cercle Antarctique; la quatriéme est enfermée dans le Cercle Arctique vers le Septentrion; la cinquiéme dans le cercle Antarctique vers le Midi. Les anciens ont dit que trois de ces Zones estoyent inhabitables, à sçavoir premierement celle qui est entre les deux Tropiques; pour ce qu'ils croyoient que le Soleil passant par dessus la teste de ceux qui y demeurent, excitoit une chaleur intolerable par ses rayons qu'il darde à plomb sur la terre; & pour ceste cause ils l'ont appellée Zone torride, c'est à dire bruslée ou rostie. Ils ont appellé Zones Froides les deux qui sont situées sous les Poles Arctique & Antarctique; pource qu'en icelles domine tousjours une tres-grande froidure, à cause que le Soleil jette dessus ses rayons fort obliquement, & n'en donne point si droit qu'il puisse exciter de la chaleur. Ils ont appellé les autres deux qui sont entre le cercle Arctique & le Tropique de Cancer, & entre le cercle Antarctique & le Tropique de Capricorne, Zones temperées, & ont estimé que celles-cy seules estoyent habitables. Mais l'experience, qui est une tres-bonne maistresse, nous a assez appris par des longs voyages des Espagnols, Portugais & autres, que non seulement la Zone torride estoit habitée de divers peuples & nations, mais aussi qu'elle abondoit en toutes sortes de fruicts & d'animaux. Et que les Zones froides en plusieurs endroits n'estoyent pas du tout vuides d'habitans.
[ Voir fig.: Apianus, Cosmographicus liber, 1533.] |
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Et outre, les anciens ont distingué les habitans des Zones, selon la diversité des ombres que les corps jettent, en Perisciens, Heterosciens, & Amphisciens. Ils appellent Perisciens ceux qui habitent és deux Zones froides, pource que quand le Soleil par son mouvement journalier tournoye sur leur Horizon sans se coucher, les ombres des corps tournent tout à l'entour d'eux en l'espace de 24 heures. Ils nomment Heterosciens les habitans des Zones temperées, pource que leurs ombres meridiennes vont tousjours vers une mesme partie du monde, à sçavoir vers le Septentrion à ceux qui habitent entre le Tropique de Cancer & le cercle Arctique; & vers le Midi à ceux qui demeurent entre le Tropique de Capricorne & le cercle Antarctique. Finalement ils appellent Amphisciens ceux qui habitent en la Zone torride entre les deux Tropiques, pource qu'en diverses saisons de l'année leurs ombres meridiennes tendent tantost vers le Septentrion, tantost vers le Midi, à cause que le Soleil va des deux costez de leur Zenith ou poinct vertical. Car quand le Soleil est és signes Septentrionaux, leurs ombres regardent vers le Midi, & quand il est és signes meridionaux, elles regardent vers le Septentrion. D'avantage, les anciens ont distingué les habitans de la terre, selon la situation de leurs demeures opposées, en Perioeciens, Antoeciens, & Antipodes. Les Perioeciens sont ceux qui demeurent sous un mesme Parallel & Meridien, mais en divers demi cercles du Meridien. Les Antoeciens sont ceux qui habitent sous un mesme demi meridien, mais en divers Parallels, à sçavoir l'un autant Septentrional que l'autre est Meridional. Les Antipodes sont ceux qui habitent en parallels opposez, & en divers demi cercles du Meridien, c'est à dire qui sont opposez diametralement les uns aux autres, & directement pieds contre pieds. Nous avons communes avec nos Perioeciens mesmes saisons de l'année, comme du Printemps, de l'Esté, de l'Automne & de l'Hyver, & mesme temperature d'air; accroissemens & |
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decroissemens de jours & de nuicts, & habitons en une mesme Zone. Mais nous différons d'avec eux en ce que quand nous avons midi, ils ont minuict, & à l'opposite. Nos Antoeciens & nous avons en mesme temps midi & minuict; mais il y a difference és saisons de l'année; Car nostre Esté est leur Hyver, & nos plus long jours sont leurs plus courts; & demeurons bien les uns & les autres en des Zones temperées, mais de nom & condition divere. Nous avons toutes choses contraires à nos Antipodes, comme les saisons de l'année, les jours & les nuicts; Car quand le Soleil en Esté nous fait le plus grand jour, ils ont le plus court & l'Hyver; nous avons un mesme Horizon avec eux, mais opposé; & quand le Soleil, la Lune & les estoiles nous levent, ils se couchent à eux, & au contraire.
[ Fig.: Apianus, 1524, Col. 56 (né en Leisnick); 1533, 28v; 1551: fig. 3.]
Les anciens aussi ont distingué la terre dés l'Equateur vers le Septentrion & le Midi, en Climats & Parlallels, selon les divers accroissemens du plus long jour de l'année. Ils appellent Climat l'espace de terre contenu entre deux cercles Parallels à l'Equateur, en telle sorte que de l'un à l'autre la longueur du plus long jour croisse d'une demie heure. Ils nomment Parallels ceux entre lesquels le plus long jour croist d'un quart d'heure, de sorte que chasque Climat comprend en soi deux Parallels. Ils content sept Climats de chasque costé de l'Equateur, & les nomment du nom de quelque celebre ville, isle, riviere, ou montagne, par lesquels passe le Parallel du milieu du Climat. Le premier Climat Septentrional passe par Meroé isle du Nil; Le second par Syene ville d'Egypte; Le troisiéme par Alexandrie capitale d'Egypte; Le quatriéme par Rhodes, qui est une isle de la mer Mediterranée; Le cinquiéme par Rome; Le sixiéme par Borystene riviere de Sarmatie; Le septiéme par les Riphées montagnes de Sarmatie.
[ Fig.: Apianus 1533, Frisius 1556, Oronce Finé 1532, Vol. 3, Fo. 144. ] |
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Ils donnent mesmes noms aux Climats qui sont de l'autre costé de l'Equateur, & tendent autant vers le midi que ceux-cy vers le Septentrion, y adjoustant seulement le mot Opposé, disans le climat opposé à celui de Meroe, opposé à celuy de Syene, opposé à celui d'Alexandrie, & ainsi de suite. Quelques Geographes ont encor adjousté deux climats aux sept premiers; d'autres cinq; les nouveaux les ont accreus jusqu'au nombre de 23. Les autres estiment que ceste division est inepte; premierement à cause de leur tres-grande inesgalité; Car le premier comprend en sa largeur 127 lieuës, le neufviéme environ 34, & le vingt & troisieme ou dernier, à peine une. Puis apres pource quils ne servent à rien, car on trouve aussi aisément la longueur des plus grands jours, que le nombre des climats. Que s'il est du tout necessaire de diviser le Globe terrestre en Climats, on pourra avec une plus grande esgalité partager chasque Hemisphere de la terre, de part & d'autre de l'Equateur, en neuf climats de pareille largeur, par chasque dixaine de degrés du Meridien, en ceste sorte. Le premier Climat Septentrional commencera à l'Equateur, & finira à la latitude de 10 degrés, & on l'appellera Ethiopique, pource qu'il passe par le milieu de l'Ethiopie. Le second finira à la latitude de 20 degrés, & s'appellera Arabique, pource qu'il contient une grande partie de l'Arabie heureuse. Le troisiéme, à la latitude de 30 degrés, & s'appellera Egyptien. Le quatriéme qui s'estend jusqu'à la latitude de 40 degrés, Syrien. Le cinquiéme qui va jusqu'à 50 degrés, Italien ou François. Le sixiéme qui finit au 60 degrés, Allemand ou Anglois. Le septiéme qui atteint jusqu'à 70 degrés de latitude, Suedois. Le huictiéme qui va jusqu'à 80 degrés de latitude, Glacial Septentrional. Le neufviéme qui va jusqu'au Pole, Septentrional ou Polaire Septentrional. Et de ces Climats il y en aura sept habitables, les deux autres seront inhabitalbles; |
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On distinguera en mesme façon les Parallels, mais avec ceste difference qu'ily en aura deux fois autant. On partagera de mesme les Climats de l'autre costé de l'Equateur. Car le premier commencera à l'Equateur, & finira en la latitude Meridionale de 10 degrés, & pourra estre appellé Bresilien, pource que le Bresil est pour la pluspart situé sous ce climat, & que ceux qui navigent de là l'Equateur vers l'Occident, le rencontrent le premier. Le second qui s'estendra jusqu'à la latitude de 20 degrés, sera nommé Perüan, du pays de Peru qu'il contient. Le troisiéme qui ira jusqu'à la latitude de 30 degrés, Paraguayque, du nom du pays qu'il comprend. Le quatriéme jusqu'à la latitude de 40 degrés Chilique, du royaume de Chili. Le cinquiéme, jusqu'au 50 degrés de latitude, Sauvage, pource que ceste contrée de l'Amerique est habitée par des hommes Sauvages. Le sixiéme jusqu'au 60 degrés, Magellanique. Le septiéme jusqu'au 70 degrés, Incognu. Le huictiéme jusqu'au 80 degrés, Glacial Meridional. Le neufviéme jusqu'au Pole, Polaire Meridional. Suivant ceste distinction, on trouvera sans peine la situation de chasque lieu, par les degrés de latitude. Par exemple, Rome, Venise & Paris, qui sont situées entre le 40 & 50 degrés de latitude, seront au cinquiéme climat. Amstredam & Londres, qui sont entre le 50 & 60 degrés, seront au sixiéme. Goa és Indes Orientales au second. L'isle de Zeilan & la Guinée au premier. Et ainsi des autres. |
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Des Estoiles, de leurs differences, noms, & division. I. De la difference des Estoiles.
D'avantage comme on voit que les estoiles se surpassent les unes les autres en grandeur apparente & clarté, ainsi les divise-on en six grandeurs. Car on appelle les plus grandes & les plus reluisantes, estoiles de la premiere grandeur; celles qui sont un peu moindres, de la seconde; celles qui sont encore moindres, |
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de la troisiéme, de la quatriéme & de la cinquiéme; finalement les plus petites, de la sixiéme grandeur; outre quelques nebuleuses & obscures; comme elles sont toutes representées au Globe celeste par diverses marques. On distingue au ciel les Planetes d'avec les estoiles fixes en ceste maniere. Les estoiles fixes paroissent tousjours briller, sur tout quand l'air est serain; mais les Planetes jettent des rayons immobiles comme la Lune, sinon que paraventure on veüille excepter Mercure, Venus & Mars, qu'on apperçoit aussi par fois briller. Mais cela n'est pas ordinaire & perpetuel, & ne brillent pas si subitement que les estoiles fixes; & pourtant combien qu'ils soyent la pluspart du temps esgaux en grandeur, ou mesmes plus grands que les estoiles fixes, toutesfois on les discerne aisément d'avec elles. Les anciens font mention en leurs escrits de 1022 estoiles qu'ils ont remarquées tant en l'Hemisphere Septentrional du ciel, qu'au Meridional; Et afin qu'on les peust aisément discerner en leur donnant à chacune son nom, ils les ont compris en XLVIII images*), qu'on appelle vulgairement Constellations. Les XII principales font le Zodiaque; il y en a XXI en l'Hemisphere Septentrional, & XV au Meridional; dont voici les noms.
I I. Le Taureau contient les Pleiades, & une estoile claire en son oeil Meridional, que les Latins appellent Palilicium; les Arabes Aldebaran; Communément par excellence on lui donne le nom d'oeil du Taureau.
[ *) Voir les figures dans: Johann Bayer, Uranometria, 1603.] [ °) Composition: Zodiaque en 12 fois 30°.] |
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I I I. Gemini ou les Gemeaux ont deux claires estoiles en leurs testes. I V. Cancer ou L'Escrevisse n'est composé que de petites estoiles, & au milieu de sa poictrine il en a une nebuleuse, que les Latins appellent Praesepe, c'est à dire la Creche. V. Le Lion a diverses estoiles reluisantes en son col & en ses flancs, deux entr'autres; l'une en sa poictrine, qu'on appelle le Coeur de Lion, l'autre en sa queuë, qu'on appelle la Queuë du Lion. V I. La Vierge a en sa main gauche une estoile reluisante fort cognuë, qu'on appelle l'Espic de la vierge. V I I. Libra, ou la Balance a deux estoiles claires par dessus les autres, qu'on appelle les Bassins de la balance. V I I I. Au Scorpion il y a diverses estoiles reluisantes, principalement une qui est au milieu, qu'on appelle le coeur du Scorpion, ou bien Antares. I X. Le Sagittaraire n'a point d'estoiles reluisantes, sinon paraventure en son arc & en sa flesche. X. Capricorne a en sa queuë deux estoiles plus reluisantes que les autres. X I. Aquarius ou le Verse-eau, au bout de l'eau en a une claire, qu'on appelle Fomahant. X I I. Les Poissons sont composez de plusieurs petites estoiles, & d'un fil qui les lie ensemble.
I I. La Grande Ourse a sept estoiles reluisantes, qu'on appelle |
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le Chariot. Quatre d'icelles, qui sont en son corps, & font un quarré, sont prises pour le Chariot, & les trois autres en sa queuë les Chevaux. I I I. Le Dragon a en sa teste deux estoiles peu reluisantes. I V. Cepheus n'a point d'estoiles remarquables. V. Bootes ou le Bouvier a entre ses cuisses une grande estoile & fort cognuë, qu'on appelle Arcturus. V I. La Couronne Septentrionale a une estoile reluisante qui porte le mesme nom. V I I. Hercules a une estoile en sa teste qui est assés cognuë. V I I I. La Lyre ou le Vautour a une estoile de mesme nom qui est fort belle & reluisante. I X. Le Cygne outre les autres en a une remarquable en sa queuë. [ Pas plus visible était P Cygni, découvert par Blaeu en 1600 [^], marqué sur la charte de Bayer IX: en la poitrine.] X. Cassiopea a cinq estoiles qui sont bien arrangées. X I. . Perseus en a une reluisante en son costé droict. X I I. Erichthonius ou le Charretier en a une fort reluisante en son espaule gauche, qu'on appelle Hircus ou Capella, c'est à dire la Chevre. X I I I. Ophiuchus ou le Serpentaire. X I V. Le Serpent d'Ophiuchus. X V. La Flesche. X V I. L'Aigle, ou Vautour volant outre les autre en a une claire en son espaule. X V I I. Le Dauphin a la figure d'un Rhombe. X V I I I. Le Poulain, ou moitié de cheval. X I X. Pegase ou le Cheval aislé a deux estoiles clairres en ses aisles, & une en sa poictrine. X X. Andromede a une estoile claire en sa teste, laquelle avec ces trois du Pegase fait un grand quarré. X X I. Le Triangle ou Deltoton. |
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I. La Baleine en a une en sa queuë, qui est mediocrement reluisante. I I. Orion a plusieurs belles estoiles, dont les principales sont, deux en ses espaules, trois en sa ceinture, qu'on appelle Les trois Rois, une en son genoüil droict, & une fort claire en son pied gauche, que les Arabes nomment Rigel. I I I. Le Fleuve Eridan ou bien le Nil a en son extremité une estoile reluisante, laquelle nous ne voyons point en ces pays Septentrionaux; les Arabes l'appellent Acarnar. I V. Le Lievre a quatre petites estoiles en ses oreilles. V. Le Grand Chien a une estoile tres-reluisante, qu'on appelle Sirius, laquelle est la plus claire & plus grande de toutes celles qui sont au ciel. V I. La Canicule, ou le petit Chien a une estoile reluisante, qu'on appelle Procyon ou L'avant Chien. V I I. Le Navire Argo a en son gouvernail une estoile reluisante, qu'on appelle Canopus. V I I I. L'Hydre a une estoile claire en sa poictrine, qu'on appelle le Coeur de l'Hydre. I X. La Tasse ou la Cruche est mise dessus l'Hydre. X. Le Corbeau qui est aussi au dessus de l'Hydre a deux estoiles moyennement claires, qui font une droicte ligne avec l'espic de la vierge. X I. Le Centaure entre plusieurs belles estoiles en a quatre en ses pieds de derriere, qui font une croix, que les Espagnols & Portugais en leurs navigations appellent El Cruzero. X I I. . Le Loup que le Centaure transperce. X I I I. . L'autel ou bien l'Encensoir. X I V. . La Couronne Meridionale. X V. . Le Poisson Meridional a en sa gueulle une belle estoile, que les Arabes nomment Fomahant. |
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Tycho Brahé, cest incomparable observateur du ciel & des astres, & l'Atlas de nostre siecle, a fort corrigé les Canons des estoiles fixes dressez par les anciens, en celles qu'il a peu voir sur l'Horizon de Dannemarck, & y en a adjousté un bon nombre. Fredric Houtman [^] habitant en l'isle de Sumatra a mesuré beaucoup d'estoiles en la partie du ciel proche du Pole Meridional, que ni les anciens Egyptiens, ni les Grecs, ni Tycho Brahé n'ont peu descouvrir, & les a reduit en XIII constellations [12], dont la 1 est le Phoenix, la 2 le Pigeon, la 3 la Mouche, la 4 le Poisson volant, la 5 le Chameleon, la 6 le Triangle Meridional, la 7 l'Oiseau de Paradis, la 8 le Paon, la 9 l'Indien, la 10 la Gone, la 11 le Toucan ou la Pie d'Inde, la 12 l'Hydre, la 13 le poisson que les Espagnols appellent Dorado; comme on le peut voir en nos Globes celestes. [^] Outre les estoiles comprises és Canons des Astronomes, qui sont és constellations, ou à l'entour d'icelles, on apperçoit en hyver quand l'air est serain (pource qu'alors les tenebres sont plus profondes, l'air n'estant esclairé d'aucune lumiere du Soleil comme en esté) une multitude innombrable de fort petits estoiles, qu'il est impossible de voir en esté. Davantage on voit en la Sphere des estoiles fixes une place large & claire qui entoure le ciel comme une ceinture, & qui est de couleur pasle ou de laict, d'où on lui a donné le nom de Voye Lactée; vulgairement on l'appelle le chemin de S. Iaques. Or la Voye Lactée est plus claire & plus blanche, & plus large en un endroit qu'en l'autre; Item, en un lieu elle est double, ailleurs |
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elle est simple; & va dés la Charretier vers le Midi, au travers des Gemeaux, du grand Chien & du navire Argo, & retourne vers le Septentrion au travers du Scorpion, du Sagittaire, du Serpentaire, de l'Aigle, du Cygne, de Cassiopea, & de Perseus, jusqu'à ce qu'elle revienne vers le Charretier, comme on le peut voir au Globe celeste, où elle est representée en sa vraye situation. Ceste blancheur de laict & lueur ne procede point d'ailleurs que d'une grande multitude de petites estoiles qui sont en cest endroit du ciel, que nous ne pouvons voir que confusement; Car les lunettes d'approche, n'agueres inventées, le nous peuvent apprendre, par le moyen desquelles on discerne clairement ces petites estoiles, qu'il est impossible de voir autrement. On voit encor autour du Pole Meridional deux taches blanches, comme deux petites nuës, de mesme couleur que la Voye Lactée, dont l'une est presque trois fois aussi longue que l'autre. Quelques Mariniers les appellent les nuës de Magellan.
La longitude donc des estoiles, est l'arc de l'Ecliptique contenu entre deux demicercles de longitude; (c'est à dire qui sont tirez par les Poles de l'Ecliptique) desquels l'un passe par le commencement de quelcun des douze signes, duquel on prend le commencement de la longitude; l'autre au travers de l'estoile; Et on conte les longitudes de signe en signe jusqu'au |
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30 degré en chacun; Ou bien du demicercle de longitude qui passe par le commencement d'Aries, en continuant par tout le circuit de l'Ecliptique jusqu'à 360 degrés. La latitude des estoiles est l'arc du demicercle de longitude, tiré au travers de l'estoile, qui est contenu entre l'estoile & l'Ecliptique; Et est de deux sortes, à sçavoir Septentrionale és estoiles qui tirent de l'Ecliptique vers le Septentrion, & Meridionale en celles qui tendent vers le Midi.
C H A P. V I. Du mouvement propre de la Sphere des estoiles fixes, autour de l'Aissieu du Zodiaque.
L'autre mouvement de la Sphere des estoiles fixes, qu'on appelle Second & Propre aux Planetes, se fait, tout au contraire du Iournalier, d'Occident en Orient, sur l'Aissieu & les Poles de l'Ecliptique; & suivant l'opinion de Tycho Brahé s'acheve en 25412 ans, apres laquelle periode d'années les estoiles fixes retourneront aux lieux où elles estoyent premierement. Mais pource que ce mouvement propre des estoiles fixes se fait sur |
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les Poles de l'Ecliptique, il est aisé à entendre de là; Premierement, qu'elles n'ont aucun mouvement de latitude, mais seulement de longitude, veu qu'en chasque centaine d'années elles font un degré & 25 minutes, ou bien un degré entier en 70 ans & 215 jours. Secondement, on voit la difference des signes du Zodiaque ou douziémes parties de l'Ecliptique, c'est à dire, pourquoy les images du Globe celeste, qui font le Zodiaque, ne s'accordent pas avec les signes; mais Aries occupe la place du signe de Taurus; Taurus celle de Gemini, & ainsi de suite. Car le second & propre mouvement des estoiles fixes est cause de ceci, & fait que les estoiles fixes avec leurs images changent de place, les signes ou douziémes parties demeurans tousjours en un mesme lieu; ce qui peut apparoir par la conference des observations de divers temps. Car il y a environ deux mille ans que les Astronomes Egyptiens & Grecs, vacans à l'observations des Astres, trouvoyent que la premiere estoile des cornes d'Aries estoit proche du commencement du signe d'Aries, duquel elle s'est maintenant esloignée de 28 degrés vers Orient; tellement qu'en ce temps là les images s'accordans avec les signes de l'Ecliptique, ils ont aussi donné aux signes du Zodiaque les noms des constellations voisines.
C H A P. V I I. Du mouvement du Soleil en l'Ecliptique.
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ou naturelle, qui est de 365 jours, cinq heures, & environ 49 minutes, & fait presque un degré chasque jour par ce mouvement. Au printemps, dés le 20 jour de Mars jusqu'au 22 de Iuin, il parcourt les signes d'Aries, de Taurus, & de Gemini, jusqu'au Solstice d'esté. En esté, dés le 22 de Iuin jusqu'au 22 de Septembre, il parcourt Cancer, Leo & Virgo jusqu'à l'Equinoxe d'automne. En automne, dés le 22 de Septembre jusqu'au 22 de Decembre, il se pourmene par les signes de Libra, Scorpius & Sagittarius, jusqu'à ce qu'il soit arrivé au Solstice d'hyver. Il acheve les trois autres signes de Capricornus, Aquarius & Pisces durant l'hyver, dés le 22 de Decembre jusqu'au 20 de Mars, jusqu'à tant qu'il retourne à l'Equinoxe du printemps au commencement d'Aries. Et d'ici il appert, que le Soleil traverse l'Equinoctial deux fois l'an; autrement il decline tousjours d'icelui tantost d'un costé, tantost d'un autre. Or quant à ce qu'on appelle Solstices les commencemens de Cancer & de Capricorne, comme si le Soleil sans se bouger, faisoit là ses stations, il ne le faut pas entendre de son mouvement par l'Ecliptique, mais au regard de sa declinaison de l'Equateur. Car les parties de l'Ecliptique quelques degrés devant & apres les commencemens de Cancer & de Capricorne, sont presque parallels à l'Equateur; de sorte que quand le Soleil y passe, il ne varie point ou fort peu sa declinaison, & par ce moyen est reputé comme immobile. Le mouvement propre du Soleil par l'Ecliptique peut estre expliqué par ceste similitude; Mettez sur le Globe une petite mouche qui se pourmene par l'Ecliptique d'Occident en Orient; & tournez le Globe à l'entour de son Aissieu d'Orient en Occident, en telle sorte que toutes les fois que le Globe aura fait une revolution, la mouche au contraire ait fait environ un degré; & finalement que le Globe ayant parachevé en l'espace d'un an 365 revolutions d'Orient en Occident; la |
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mouche cependant soit allée d'Occident en Orient par tous les signes du Zodiaque. Nous n'avons pas deliberé de parler ici des autres Planetes, desquels on ne peut representer le cours és Globes; seulement nous advertissons en passant, que Saturne, qui est le plus proche des estoiles fixes, paracheve son cours propre en l'espace de 30 ans, Iupiter en 12, Mars en 2; Venus & Mercure, qui accompagnent tousjours le Soleil, en un an; & la Lune en 27 jours. Et tous ces Planetes ne vont pas tousjours sous l'Ecliptique, comme le Soleil, mais s'escartent d'elle tantost vers le Septentrion, tantost vers le Midi, selon que requiert leur propre latitude.
C H A P. V I I I. De l'Horizon.
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voye la vraye moitié du ciel, de la superficie de la terre, tous obstacles de montagnes, de costaux & d'arbres estant ostez; (mesme celui qui regarde de dessus une haute montagne, voit plus que la moitié du ciel) On prend ce cercle visible pour l'Horizon, & l'appelle on Naturel, pour le distinguer du Mathematique. Au reste on peut aussi monstrer que la distance de la superficie de la terre à son centre, n'a aucune proportion sensible à la grandeur du ciel: En la figure qui est ici adjoustée, le petit cercle descrit à l'entour du centre A est le Globe de la terre, AB est son demi diametre, ou bien la distance qu'il y a de la superficie B, au centre A. Le grand cercle DFG est la Sphere des estoiles fixes, laquelle selon l'opinion d'Alfraganus & des autres est esloignée du centre de la terre, pour le moins de 22612 demi diametres de la terre. AG donc qui est le demi diametre de l'Horizon Mathematicien, qui passe par le centre de la terre, contient 22612 parties, dont AB demi diametre de la terre en fait une. Maintenant si de la superficie B, on tire la ligne BE, qui represente le demi-diametre de l'Horizon naturel, parallele avec AG; l'arc GE, qui monstre la difference de deux Horizons, ne sera pas plus grand au cercle DFG que 9 secondes, cest à dire que la quatrecentiéme partie d'un degré; laquelle quantité certes est imperceptible, comme sçavent ceux qui ont appris les premiers elemens de Geometrie. |
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On appelle Horizon apparent ou visible, l'espace de terre ou de mer, qu'on peut appercevoir de ses yeux en rond tout à l'entour, qui de costé & d'autre de loeil ne s'estend gueres plus loin que deux lieuës communes. Car pource que la superficie de la terre & de la mer est ronde, és lieux unis, l'oeil qui est au dessus d'elle ne peut pas appercevoir plus d'espace, que les lignes droictes, qui de toutes parts sortent de l'oeil jusqu'à l'attouchement du globe, n'en coupent, comme ceux la sçavent qui sont tant soit peu versés en l'optique.
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L E S E C O N D L I V R EDe la premiere Partie;Auquel est traictéD E L' V S A G ED E S G L O B E S.
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La seconde, des quadrans au Soleil. La troisiéme, des Rombes & de leur usage en la Navigation. LXXIX Problemes. Les Problemes de la premiere Section. |
I. | Des diverses situations de la Sphere. | 39 |
II. | Que l'elevation du Pole est esgale à la latitude de chasque lieu, & qu'avec la hauteur de l'Equinoctial, elle fait 90 degrés. | 44 |
III. | Trouver au globe terrestre la longitude & latitude des lieux. | 45 |
IV. | Trouver au Globe terrestre les places dont la longitude & latitude sont cognuës. | 46 |
V. | Trouver la distance entre deux lieux, par le moyen du Globe terrestre. | 47 |
VI. | Mettre les Globes en mesme situation que le monde. | 47 |
VII. | Vn certain lieu estant donné, trouver la situation des autres lieux suivant l'angle de Position. | 48 |
VIII. | Trouver au Globe terrestre les Perioeciens, Antoeciens & Antipodes. | 50 |
IX. | Trouver le lieu du Soleil en l'Ecliptique, en tout temps de l'année. | 51 |
X. | Trouver la declinaison du Soleil. | 51 |
[ 35 ]
XI. | Comment on peut avoir la declinaison des estoiles. [Table] | 52 |
XII. | De la hauteur du Soleil & des estoiles, & comment on la trouve. [Fig.] | 59 |
XIII. | Trouver l'elevation du Pole, par le moyen des estoiles qui sont à l'entour. | 61 |
XIV. | Trouver la mesme elevation par le moyen des estoiles qui sont proches de l'Equinoctial. | 63 |
XV. | Trouver l'elevation du Pole par le moyen du Soleil. | 65 |
XVI. | Trouver l'elevation du Pole par les rayons du Soleil. | 67 |
XVII. | Trouver la declinaison du Soleil & son lieu en l'Ecliptique, par le moyen de ses rayons. | 68 |
XVIII. | Remarquer en quel endroit de l'Horizon le Soleil & les estoiles & autres astres se levent ou se couchent. | 68 |
XIX. | Des diverses ascensions & descensions du Soleil & des estoiles, & par quel moyen on les peut trouver. [Table] | 70 |
XX. | Trouver avec quel degré de l'Ecliptique, quelque estoile tient le milieu du ciel ou monte sur l'Horizon en la Sphere droite. | 77 |
XXI. | Trouver le degré du Zodiaque qui se leve ou qui se couche avec quelques estoiles en la Sphere oblique. | 78 |
XXII. | Trouver l'heure du lever & du coucher du Soleil tous les jours de l'année, en quelque latitude que ce soit. | 78 |
XXIII. | Cognoistre en tout temps & en tout lieu la longueur des jours & des nuicts. | 81 |
XXIV. | Trouver en tout temps & en tout lieu l'heure du lever & du coucher des estoiles. | 81 |
XXV. | Triuver en une certaine latitude donnée les estoiles qui ne se couchent ou ne se levent jamais. Item celles qui viennent jusqu'à l'Horizon sans descendre au dessous, ou qui passent tous les jours par le Zenith. | 82 |
XXVI. | Trouver en une certaine latitude donnée, l'intervalle de temps qu'il y a entre le lever ou le coucher des deux estoiles, ou de quelque constellation. | 83 |
XXVII. | Remarquer le commencement & la fin des crepuscules, en tout temps, & en tout lieu. | 85 |
[ 36 ]
XXVIII. | Trouver le triple lever & coucher des estoiles ou des signes avec le Soleil, suivant la description des anciens poëtes. | 86 |
XXIX. | De l'Azimuth du Soleil & des estoiles, & comment on le trouve. | 90 |
XXX. | Des Almucantarath, ou cercles de hauteur, comment on les trouve. | 91 |
XXXI. | Dresser en tout temps le Globe celeste en mesme situation que le ciel. | 93 |
XXXII. | Cognoistre les estoiles par le moyen du globe celeste. | 95 |
XXXIII. | Trouver és Globes celestes les longitudes & latitudes des estoiles. | 97 |
XXXIV. | Trouver en tout temps l'Azimuth du Soleil, & l'heure du jour par la hauteur d'icelui. | 99 |
XXXV. | L'Azimuth du Soleil estant cognu, trouver sa hauteur & l'heure du jour. | 100 |
XXXVI. | Trouver en tout temps par le Soleil sa hauteur, son Azimuth, & l'heure du jour. | 101 |
XXXVII. | La hauteur des estoiles estant cognuë, trouver leur Azimuth, & l'heure de la nuict. | 101 |
XXXVIII. | L'Azimuth des estoiles estant cognu, trouver leur hauteur & l'heure de la nuict. | 102 |
XXXIX. | Trouver l'heure de la nuict par deux estoiles qui sont en mesme Azimuth. | 102 |
XL. | Trouver l'heure de la nuict par le lever ou coucher des estoiles, ou par leur arrivée au Meridien, tant du costé du Midi que du Septentrion. | 103 |
XLI. | Trouver en tout temps l'Azimuth & l'Almucantarath du Soleil & des estoiles. | 105 |
XLII. | Trouver en tout temps quelle heure du jour il est és autres lieux. | 106 |
XLIII. | Trouver quelle heure il est au lieu de nostre demeure, quand le Soleil ou les estoiles se levent ou se couchent, és autres pays, ou sont eslevées d'une certaine hauteur sur l'horizon. | 107 |
XLIV. | Trouver de jour par le Soleil les heures d'Italie. | 108 |
[ 37 ]
XLV. | Trouver de nuict par les estoiles les mesmes heures d'Italie. | 109 |
XLVI. | Trouver en tout temps les heures contées du lever du Soleil. | 110 |
XLVII. | Trouver tant de jour que de nuict les heures inesgales, qu'on appelle Planetaires. | 111 |
XLVIII. | Trouver à quel lieu de la terre le Soleil est vertical au temps donné. | 116 |
XLIX. | Remarquer en quel endroit de la terre le Soleil touche à l'Horizon de jour & de nuict en se levant ou en se couchant. | 117 |
L. | Trouver en tout temps [par] les rayons du Soleil en quels lieux de la terre le Soleil est à l'Horizon se levant ou se couchant. | 118 |
LI. | Trouver en combien de lieux tant de mesme longitude que de diverse, le Soleil est en mesme temps esgalement eslevé sur l'horizon. | 119 |
LII. | Mettre les planetes au Globe celeste, & apprendre par là à les cognoistre. | 123 |
LIII. | Dresser les douze maisons du ciel par le moyen du Globe celeste. | 126 |
Les Problemes de la deuxiéme Section. | ||
LIV. | Trouver le vrai Midi & Septentrion. | 134 |
LV. | Trouver la Declination, Reclination & Inclination de toutes sortes de superficies. | 137 |
LVI. | Descrire un Quadran horizontal. | 139 |
LVII. | Descrire un Quadran Vertical, Meridional direct. | 141 |
LVIII. | Tracer un Quadran direct Septentrional. | 143 |
LXIX. | Faire des quadrans verticaux directs avec un Horizontal. | 144 |
LX. | Descrire des quadrans verticaux declinans du Midi. | 145 |
LXI. | Descrire des quadrans verticaux declinans du Septentrion. | 148 |
LXII. | Faire des quadrans verticaux declinans, avec un Horizontal. | 149 |
LXIII. | Tracer des quadrans Reclinés ou Enclinés directs. | 153 |
LXIV. | Descrire des quadrans Reclinés declinans. | 153 |
LXV. | Descrire aussi des Enclinés declinans. | 157 |
[ 38 ]
LXVI. | Tracer des Reclinés & Enclinés, declinans Septentrionaux. | 159 |
LXVII. | Faire des Reclinés declinans avec un Horizontal. | 160 |
LXVIII. | Item des Enclinés declinans. | 162 |
LXIX. | Descrire un quadran Equinoctial. | 164 |
LXX. | Tracer des quadrans Orientaux & Occidentaux. | 165 |
LXXI. | Descrire des quadrans Polaires. | 167 |
Les Problemes de la troisiéme Section. | ||
LXXII. | La difference de longitude, & la latitude de deux lieux qui ont une mesme latitude estant cognuë, trouver leurs Rombes & leurs distances. | 170 |
LXXIII. | La distance & latitude de deux lieux qui ont une mesme latitude estant donnée, trouver leurs Rombes & la difference de longitude. | 171 |
LXXIV. | Les Rombes & latitudes de deux lieux de diverses latitudes estans cognuës, trouver la difference de longitude & la distance. | 172 |
LXXV. | Les longitudes & latitude[s] de deux lieux estans données, trouver leurs Rombes, & leur distance. | 173 |
LXXVI. | Les latitudes & distance de deux lieux estans données, trouver leurs Rombes, & la difference de longitude. | 174 |
LXXVII. | Les Rombes de deux lieux, difference de longitude & latitude de l'un estant données, trouver la latitude de l'autre & la distance. | 175 |
LXXVIII. | Les Rombes & distance de deux lieux estans données avec la latitude de l'un, trouver la latitude de l'autre, & la difference de longitude. | 176 |
LXXIX. | Trouver la variation de l'aiguille marine. | 176 |
[ 39 ]
[...]
[ 181 ]
[ Figure comme Ph. Lansbergen, Progymn. 1619 (titre) et Comm., p. 16.] |
[ 182 ]
E premier traicte; de la Fabrique & division des Spheres. Le second, de leurs divers usages.
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[ 183 ]
[ 184 ]
Le second, de la construction des Spheres, & de leur comparaison avec le ciel. Le troisiéme, du triple mouvement de la terre. Le quatriéme, enseigne à trouver par la Sphere le triple mouvement de la terre. Le cinqiéme, enseigne la construction de la Sphere particuliere des estoiles fixes & du Globe de la terre.
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[ 185 ]
De l'ordre des Spheres celestes. Ous avons expliqué en la premiere partie par les Globes vulgaires, comment tout ce qui apparoist du ciel aux habitans de la terre leur semble arriver par l'hypothese de la terre immobile, suivant l'intention de Ptolemée. Nous avons deliberé de monstrer en ceste seconde par nos nouvelles Spheres, comment le mesme arrive en verité par la terre mobile, suivant la vraye hypothese de Copernicus. Mais afin qu'on entende mieux ce que nous dirons, nous traicterons premierement en peu de paroles de l'ordre des Spheres celestes, selon que Copernicus le descrit au 1 liv. des Revolutions chap. 10, & puis apres aussi de la construction des Spheres & de leurs parties, & les comparerons ensemble. L'ordre des Spheres celestes est tel; la premiere & plus haute de toutes est celle des estoiles fixes, du tout immobile, avec laquelle sont comparez & examinez les mouvemens & dispositions des Spheres des Planetes. Car quant à ce que quelques-uns estiment qu'elle se meut aussi d'un mouvement fort tardif, & que de là procedent les changemens des longitudes des estoiles, nous ne nions pas que cela ne se puisse faire; mais toutefois en la description du mouvement de la terre, nous en rendrons une autre raison, par laquelle il nous semble plus probable que cela arrive. Les Spheres des Planetes sont contenuës dans celle des estoiles fixes, en cest ordre. La premiere & la plus proche des estoiles fixes, est la Sphere de Saturne, qui acheve sa course en l'espace de 30 ans; la seconde est celle de Iupiter qui l'acheve en 12 ans; la troisiéme, de Mars qui l'accomplit en deux ans; la quatriéme Sphere fait sa course en l'espace d'un an naturel, |
[ 186 ]
& en icelle la terre avec la Lune (laquelle tous les 29 jours & ½ fait une revolution autour de la terre comme en un Epicycle) sont emportez par les signes du Zodiaque. La cinquiéme Sphere est de Venus, qui fait sa course en l'espace de neuf mois. La sixiéme & plus proche du Soleil est assignée à Mercure & fait son tour en 80 jours. Tous ces mouvemens tant des Planetes que de la terre & de la Lune se font d'une mesme façon d'Occident en Orient, selon l'ordre des signes du Zodiaque. Le Soleil demeure fixe & immobile au milieu de ces Spheres celestes, comme au centre du monde, d'où comme d'un throne royal il conduit & gouverne toute la troupe des Planetes. Qui est celui, dit Copernicus, qui pourroit mettre en autre meilleure & plus commode place de ce tres-beau temple, cest excellent flambeau, qu'au centre, d'où il le peust esclairer tout à la fois? Pourtant quelques-uns, non sans raison, l'ont appellé la lumiere du monde, d'autres l'entendement & le gouverneur de l'univers, & Mercure Trismegiste, un Dieu visible. De la construction des Spheres, & de leur comparaison avec le ciel.
Le dehors, representant le ciel des estoiles fixes, qui est le |
[ 187 ]
premier & le plus haut de tous les cieux, & qui les enferme tous au dedans de soi, est composé de quatre cercles de pareille grandeur. Le plus grand d'iceux est le Zodiaque, en la superficie interieure duquel est depeinte l'Ecliptique & les douze signes &c. Les deux autres qui s'entrecoupent à angles droits enhaut & embas, coupent aussi le Zodiaque; l'un d'iceux (qui est le colure des solstices) au commencement de Cancer & de Capricorne; l'autre au commencement d'Aries & de Libra. Les poincts où ils s'entrecoupent enhaut & embas representent les Poles du Zodiaque; celui d'enhaut le Pole Boreal; celui d'embas (à l'entour duquel la Sphere est attachée au pied qui la soustient) le Pole Austral. Le quatriéme cercle est l'Equinoctial; il est oblique au regard du Zodiaque & l'entrecoupe au commencement de & de , & le colure des Solstices vers le Septentrion au commencement de Capricorne, à la distance de 23 degr. 31 min. & vers le Midi au commencement de Cancer, à la mesme distance. Ses Poles sont marquez au colure des Solstices avec deux petites poinctes; celui d'enhaut est le Pole Arctique, celui d'embas l'Antarctique. L'Aissieu du Zodiaque s'estend dés l'un des Poles du Zodiaque jusqu'à l'autre, au milieu duquel il y a une petite boule dorée representant le Soleil immobile, & comme au centre du monde. Il y a encore six Spheres entre le Soleil & les susdits cercles exterieurs, dont l'une environne l'autre, & chacune d'icelle est composée de trois cercles de mesme grandeur. La premiere & plus proche des estoiles fixes est la Sphere de Saturne, qui acheve sa course en 30 ans. La seconde de Iupiter qui l'acheve en 12 ans. La troisiéme de Mars qui la fait en 2 ans. La quatriéme est la Sphere de la terre, qui fait le tour de l'Ecliptique en un an naturel. Autour de la terre il y a encor une petite Sphere, composée pareillement de trois cercles, en laquelle la Lune comme en un Epicycle fait le tour de la terre en 29 jours & ½, & par ce mouvement est emportée avec la terre pour faire tous les ans sa |
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course à l'entour du Soleil. La cinquiéme Sphere est celle de Venus, qui fait son tour en neuf mois. La sixiéme & plus proche du Soleil, est celle de Mercure, qui acheve son circuit autour du Soleil en 80 jours. En ceste Sphere generale se void la vraye image du monde, quant à l'ordre & disposition des Spheres, mais non pas quant à la proportion de leurs distances, & grandeur des corps qu'elles contiennent. Car pource que la grandeur de la Sphere de la terre, en laquelle elle accomplit sa course annuelle à l'entour du Soleil, n'est que comme un poinct au regard de la grandeur de la Sphere des estoiles fixes, l'estenduë de la Sphere des dites estoiles fixes est pour le moins 20000 fois plus grande, que l'estenduë du cercle auquel la terre se mont [meut]. Pourtant il faudroit que les cercles exterieurs de la Sphere (qui representent le ciel des estoiles fixes) fussent pour le moins vingt mille fois plus grands que le cercle du mouvement de la terre, qui est en ceste Sphere; lequel estant d'environ 2 doigts & ½, les cercles exterieurs devroyent avoir 50000 doigts, qui font 4166 pieds ou bien 347 perches. D'avantage, pource que le Soleil au regard de l'estenduë de la grande Sphere de la terre, ne seroit pas aussi grand qu'est la teste d'une petite espingle, & qu'aussi il est pour le moins 140 fois plus grand que la terre, & 6000 que la Lune; on peut bien comprendre en son entendement la proportion des Spheres celestes & des Planetes, mais on ne sçauroit aucunement la presenter par des instrumens mechaniques. Du triple mouvement de la terre.
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[ 189 ]
à l'entour de son propre aissieu d'Occident en Orient en l'espace de 24 heures, & cause le jour & la nuict. Le second est le susdit mouvement annuel du centre de la terre autour du Soleil, d'Occident aussi en Orient, suivant la succession des signes, lequel se fait entre les Spheres de Venus & de Mars, & descrit le cercle des 12 signes du Zodiaque. Ce mouvement est cause qu'il semble que le Soleil se meuve ainsi lui mesme par le Zodiaque. Par exemple, quand le centre de la terre est parvenu au commencement de Capricorne, il semble que le Soleil entre en Cancer, & quand le centre de la terre est arrivé à Aquarius, on void le Soleil en Leo, & ainsi de suite. Ces deux mouvemens de la terre peuvent estre comparez à une boule qu'on jette avec sa main, laquelle roulant sur la terre acheve sa course*); n'ayant que ceci de difference, que la boule en roulant descrit une ligne droite, mais la terre se mouvant autour du Soleil fait un cercle. Il faut encor noter, qu'encor que le centre de la terre soit emporté par son mouvement annuel dans le plan de l'Ecliptique, toutefois l'Equateur terrestre ne s'accorde pas avec ce plan, & l'aissieu n'est pas dressé sur icelui à angles droits, en parallel avec l'aissieu du Zodiaque; mais l'un & l'autre decline du plan & aissieu de l'Ecliptique, de sorte que la terre en son mouvement journalier, descrit au ciel par ceste declinaison le cercle Equinoctial. Le troisiéme mouvement qui s'acheve en un peu moindre espace que d'un an, se fait en soi-mesme, au contraire de ce mouvement du centre de la terre & succession des signes, autour d'une ligne parallele à l'aissieu de l'Ecliptique; d'Orient en Occident. Il arrive à cause de ces deux mouvemens, qui vont presque à l'opposite l'un de l'autre, que l'aissieu & l'Equateur terrestre enclinez vers le plan de l'Ecliptique, regardent presque tousjours vers un mesme endroit du ciel; comme s'ils estoyent immobiles. Mais afin d'esclaircir, par une similitude convenable, ce troisiéme mouvement qui de soi est difficile à entendre, je di;
[ *) Lansbergen, Comm., p. 15: "instar Sphaerae in Sphaeristerio".] |
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Posez le cas qu'il faille faire en un navire le tour d'un fort ou chasteau, lors qu'un fort vent Meridional souffle; & qu'au haut du mas de ce navire il y ait une enseigne qui se meuve autour d'un baston en laquelle (comme vous le voyez en la figure ici apposée) soit depeint le Globe de la terre avec un aissieu non point eslevé perpendiculairement, mais encliné de costé en parallel avec l'aissieu du Globe terrestre; il est evident que ceste enseigne ne se tournera point avec le navire, mais demeurera tousjours tourné vers le Septentrion par la force du vent Meridional, & l'aissieu peint vers le mesme endroit du ciel; de sorte que quand le navire avançant chemin & passant d'un costé à l'autre aura achevé sa course autour du chasteau, l'enseigne aussi en mesme temps aura fait un circuit à l'entour de son baston contre le mouvement du navire, & l'aissieu du Globe terrestre peint sera tourné vers un mesme endroit du ciel. Nous pouvons aussi nous servir de la similitude de Simon Stevin, qui est telle: Si quelcun dresse un festu au milieu de la rose d'un quadran de mer, tourné vers le Pole du monde, en parallel avec l'aissieu de la terre, & que le navire avec son quadran face le tour du fort, comme auparavant; il est evident que quand le navire, passant d'un costé à l'autre, aura parachevé son tour, la rose du quadran posée sur son aiguille aura aussi fait un tour de l'autre costé contre le mouvement du navire, & qu'à mesure que le navire avance vers un costé, la rose du quadran avance vers l'autre, le festu demeurant tousjours en parallel avec l'aissieu de la terre, & regardant directement le Pole du monde. Il en prend de mesme de la terre, laquelle comme negligeant son mouvement annuel à l'entour du Soleil, & tournant |
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tousjours un bout de son aissieu vers le Septentrion, & l'autre vers le Midi, est retenuë en ce regard comme immobile. Comment le triple mouvement de la terre se trouve par la Sphere.
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& Antarctique, & que la terre tournant à l'entour de son aissieu par le mouvement journalier, descrit par son plus grand parallel le cercle Equinoctial au ciel. Le troisiéme mouvement (qui est aussi annuel & en soi-mesme) s'apperçoit ainsi en la Sphere; cependant que la terre s'avance en son chemin de lieu en lieu d'Occident en Orient, nous voyons que par le moyen de trois petites rouës qui sont sous le ciel de la terre, elle se meut une fois en elle mesme d'un mouvement contraire d'Orient en Occident; ou, afin que nous parlions plus proprement, elle est tousjours retenuë par ce moyen, (comme ne se souciant point de son mouvement annuel de lieu en lieu,) en pareille situation de son aissieu, vers une mesme contrée du ciel; tout de mesme que l'enseigne ou le festu en la rose du quadran de mer, dont il a esté parlé au precedent chapitre, qui estans emportez avec le navire, & negligeans le mouvement d'icelle, regardent tousjours un mesme endroit du ciel. Sans ce troisiéme mouvement, & sans la susdite inclination de l'aissieu de la terre vers la superficie de l'Ecliptique, on n'appercevroit aucune inesgalité de jours & de nuicts, mais ce seroit tousjours ou Solstice ou Equinoxe, ou une mesme saison de l'année perpetuellement semblable à elle mesme, comme il apparoistra plus au long de l'usage suivant. On trouve en ceste hypothese une admirable symmetrie de tout le monde, & une convenable proportion entre les mouvemens & amplitudes des Spheres celestes, qui ne se peut trouver autrement; C'est à sçavoir que toutes les Spheres ne tiennent point contre nature un chemin contraire les unes aux autres, mais vont toutes d'Occident en Orient; & que suivant la precedente description, les corps celestes qui se meuvent en des moindres cercles, achevent plustost leurs revolutions, & ceux qui se meuvent en des plus grands, plus tard & en un plus long espace de temps. Item, que les temps des revolutions sont en quelque sorte proportionnez à l'estenduë & grandeur des Spheres. |
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D'avantage on y void aussi, comme si c'estoit le vrai ciel, pourquoi les Planetes, combien qu'ils facent leurs mouvemens d'un pas esgal en des cercles nuds sans aucuns epicycles, nous semblent se mouvoir tantost vistement tantost lentement, par fois s'arrester ou retourner en arriere, & pourquoi ces mouvemens vistes, tardifs & retrogrades, apparoissent plus grands en Iupiter qu'en Saturne, & moindres en Iupiter qu'en Mars; pourquoi aussi on les void plus grands en Venus qu'en Mercure. Pourquoi encor il semble que cela arrive plus souvent en Saturne qu'en Jupiter, & en Iupiter plus souvent qu'en Mars; & en Mars plus rarement qu'en Venus & en Mercure: en outre comment il arrive que Saturne, Iupiter & Mars sont beaucoup plus proches de la terre estans opposez au Soleil (c'est à dire, quand la terre est en droite ligne entr'eux & le Soleil) & au contraire beaucoup plus esloignez de la terre en leur conjonction avec le Soleil (c'est à dire quand le Soleil est en droite ligne entr'eux et la terre) comme le diligent observateur le peut remarquer à l'oeil en Mars: car icelui montant Chroniquement (c'est à dire quand estant opposé au Soleil il se leve au soir comme le Soleil se couche) semble de nuict estre esgal en grandeur à Iupiter, ne differant d'avec lui qu'en sa couleur rougeastre, au lieu qu'à l'opposite quand il est proche du Soleil, lors que le soir il commence à se cacher sous ses rayons, où en sort le matin, il semble qu'à peine on le peut comparer avec une estoile de la seconde grandeur. Toutes lesquelles apparences procedans du seul mouvement de la terre, prouvent par un si conforme tesmoignage & par un si fort argument que la terre se meut, que celui qui y veut contredire semble se combattre contre la raison mesme. Or quant à ce que ceste varieté qu'on void és Planetes ne s'apperçoit point és estoiles fixes, cela est un tres-certain argument de leur grande distance de la terre. D'où il est aussi clair & evident que le cercle du chemin de la terre à l'entour du Soleil, |
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qui à tout le moins a 2000000 de lieuës en diametre, à peine est plus grand qu'un poinct, & est du tout insensible au regard de l'immense estenduë de la Sphere des estoiles fixes. Tant est grand & admirable cest ouvrage de Dieu. De la construction de la Sphere particuliere, des estoiles fixes, & du Globe de la terre.
Au bas il y a une croix de quatre ou six branches à raison de la grandeur de l'instrument, laquelle est posée sur pareil nombre de petits pieds: dessus ceste croix il y a deux rondeaux posez l'un sur l'autre, dont celui d'embas qui est le plus grand, & est attaché à la croix sans se pouvoir bouger, a au milieu un grand trou, dans lequel le rondeau d'enhaut qui est mobile, bouchant le trou avec une petite cheville, peut estre tourné. Hors du rondeau mobile, au bord de l'immobile, est mis le Calendrier Romain selon le nouveau style, divisé en 12 mois, |
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& chasque mois en jours; & aupres d'icelui les 12 signes du Zodiaque avec leurs degrés. Sur le rondeau mobile il y a un planisphere celeste, duquel on peut apprendre à cognoistre les constellations, & ce qui s'ensuit d'icelles. Sur les bouts de la croix sont dressées des petites colomnes, qui soustiennent ensemble un grand cercle representant le Zodiaque, en la superficie interieure duquel sont marquez les 12 signes, avec l'Ecliptique au milieu divisée en 360 degrés. [fig.] Au milieu de ce rondeau il y a un style, qui est comme une partie de l'aissieu du Zodiaque, au sommet duquel il y a une petite boule dorée qui represente le Soleil demeurant immobile au centre du monde. [fig.] Entre ceste petite boule & le susdit grand cercle, à l'un des costez du rondeau mobile il y a un petit pied sur lequel est mise une Sphere composée de divers cercles, dont le centre convient avec la superficie de la susdite Ecliptique (c'est à dire, est autant eslevé sur le rondeau que l'Ecliptique, & le centre de la petite boule dorée) & est tellement posé que quand le rondeau mobile est tourné sur l'immobile, la Sphere est quant & quant emportée par tous les signes du Zodiaque. Or la construction de ceste Sphere est telle. [fig.] Au dehors il y a quatre grands cercles d'esgale estenduë quant à leurs superficies interieures, & deux petits, tous attachez les uns aux autres & immobiles. Le plus large des quatre grands cercles, qui convient avec la superficie de l'Ecliptique exterieure, represente l'Ecliptique (laquelle, pour la distinguer d'avec l'autre, nous appellerons souvent interieure, & ceste-là exterieure) & est divisé en 12 parties, selon le nombre des signes du Zodiaque; & derechef chacune d'icelles en 30 degr. tant au bord exterieur qu'en l'interieur. En l'interieur il y a quelques estoiles fixes, distinguées par leurs noms & grandeurs, & disposées chacune selon le signe & degré de longitude qu'elle a. |
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Des trois autres cercles, deux qui sont dressez en haut s'entrecoupent en haut & embas à angles droits, & l'Ecliptique au commencement d'Aries, de Libra, de Cancer & de Capricorne. Le poinct de l'intersection d'enhaut monstre le Pole Boreal de l'Ecliptique, & celui de l'intersection d'embas (qui est fiché dans le pied) le Pole Austral. L'un de ces cercles dressez, lequel coupe l'Ecliptique és poincts de Cancer & de Capricorne (à sçavoir le colure des Solstices) est divisé en quatre fois 90 degr. qu'il faut conter des deux costez de l'Ecliptique en haut & embas vers les Poles. L'autre, qui coupe l'Ecliptique au commencement d'Aries & de Libra, n'a point d'usage, sinon qu'il sert à soustenir l'Ecliptique en balance, & le colure au niveau sans pancher de costé ni d'autre. Le quatriéme cercle, plus delié, attaché à la superficie interieure des autres, est l'Equinoctial. Il coupe l'Ecliptique au commencement d'Aries & de Libra, & le colure d'un costé au 23 degr. 31 min. en tirant dés le commencement de Cancer vers le Pole Austral; & de l'autre à autant de degrés & minutes dés le commencement de Capricorne vers le Pole Boreal. Les deux petits cercles sont de costé & d'autre parallels à l'Equateur. L'un qui en est esloigné de 23 degr. 31 min. vers le Pole Arctique (coupant le colure & touchant l'Ecliptique au commencement de Cancer) represente le Tropique de Cancer; l'autre qui est autant esloigné de l'Equateur vers le Pole Antarctique (coupant le colure & touchant l'Ecliptique au commencement de Capricorne) represente le Tropique de Capricorne. Entre ces six cercles immobiles, il y a deux demicercles, qu'on appelle demicercles de longitudes, qui se tournent haut & bas autour des Poles de l'Ecliptique, de telle sorte que la moitié de l'un peut estre appliquée à tous les poincts de l'Ecliptique qui sont en l'un de [ses] demicercles, & de l'autre à tous les poincts qui sont en son autre demicercle. Vn des bords de ces |
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demicercles, qui convient avec les Poles du Zodiaque, est divisé en deux fois 90 degrés, qu'il faut conter de l'Ecliptique en haut vers son Pole Boreal, & embas vers son Pole Austral. A ces degrés ont esté adjointes les mesmes estoiles fixes, qu'on void depeintes en l'Ecliptique, distinguées par leurs noms & grandeurs, & en mesme latitude Boreale & Australe au regard de l'Ecliptique, qu'elles ont au ciel. Que si on adjoustoit encore des deux costez de l'Ecliptique un ou plusieurs tels demicercles aux precedens, ils seroient fort commodes en divers cas. Or par ces demicercles & par ces six cercles entiers, nous est representée ceste grande & immobile Sphere des estoiles fixes. Au milieu de ces cercles est le Globe de la terre, qui de son aissieu ne regarde pas directement les Poles du Zodiaque, mais (suivant la description du troisiéme chapitre) encline vers la superficie de l'Ecliptique. Les bouts de l'aissieu, dont celui d'enhaut monstre le Pole du monde Septentrional, celui d'embas le Pole Austral, s'estendent par le colure des Solstices jusques à la distance de 23 degr. 31 min. dés le Pole Boreal du Zodiaque embas vers le Tropique de Cancer, & dés l'Austral en haut vers le Tropique de Capricorne. La terre fait son mouvement journalier, dont il a esté parlé au troisiéme chapitre, à l'entour de cest aissieu & de ses Poles. Dedans le colure est joint à l'aissieu le Meridien de cuivre, divisé en quatre fois 90 degrés, qui sont contez au costé Boreal du Meridien, dés les Poles vers le milieu d'icelui; au costé Austral de part & d'autre dés le milieu vers le Pole. Au Globe terrestre sont depeints les Meridiens, parallels, regions, isles, & eaux qui environnent la terre. En l'Equateur terrestre à 90 degr. du Meridien de costé & d'autre, il y a deux styles ou brochettes, au bout desquels est attaché un rondeau plat, qui se tourne à l'entour d'iceux comme à l'entour de son aissieu; dont la circonference exterieure est de mesme estenduë que l'exterieure du Meridien: |
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Sa superficie d'enhaut (qui divise la terre, le Meridien & tous les grands cercles en deux parties esgales) represente l'Horizon, & est divisé en croix, selon les quatre principales contrées du monde, à sçavoir Septentrion, Orient, Midi & Occident, en quatre quarts, & chacun d'iceux en 90 degrés, qu'il faut conter de part & d'autre dés le Midi au Septentrion jusqu'à 180. Au bord exterieur d'icelui sont escrits les noms des 32 vents, suivant l'usage vulgaire de la navigation [^]; & au dedans d'iceux aussi les noms des 12 vents [^] dont se servoyent les Grecs & Romains, avec une peinture representant leur nature & proprietez. Il y a deux entailleurs à l'Horizon, l'une du costé du Septentrion, l'autre du Midi, dans lesquelles le Meridien est tellement fiché, que l'Horizon peut estre haussé & baissé autour du Meridien, au Septentrion & au Midi, & appliquée à quelque degré du Meridien qu'on voudra. Ici est à noter, que la terre, le Meridien & l'Horizon sont tellement attachez les uns avec les autres, que quand on tourne l'un à l'entour de l'aissieu de la Sphere, les autres y tournent aussi; & que le seul Horizon peut se mouvoir à part autour des styles par lesquels il est attaché à la terre, comme autour de son aissieu, & que, sans que les autres bougent, il peut estre appliqué à divers endroits du Meridien. En chasque hemisphere de l'Horizon il y a un demicercle attaché de telle sorte par un de ses bouts au Zenith & par l'autre au Nadir, en un petit cercle fiché au Meridien & mobile, que l'Horizon estant tourné autour du Meridien, quant & quant aussi chasque bout tourne au Meridien, & que celui d'enhaut demeure tousjours au Zenith, celui d'embas au Nadir à l'opposite. La moitié de chacun sur l'Horizon est divisée en 90 degrés, en montant de l'Horizon en haut, de sorte que chasque demicercle represente le cercle vertical ou le quart de hauteur, qui se mouvant par l'Horizon, peut estre appliqué |
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selon qu'on veut à tous les degrés d'icelui, contés du midi ou du Septentrion. Hors du Colure autour de l'aissieu de la terre est mis le cercle horaire, divisé en deux fois 12 heures, de telle façon que le bout de l'aissieu passe par le centre d'icelui. A ce bout est mis un indice fait de telle sorte, que le Globe terrestre estant tourné autour de son aissieu sa pointe va par toutes les heures du cercle, & l'aissieu s'arrestant il peut estre appliqué à quelque heure qu'on voudra. Il y a au dessous de la Sphere un rondeau assés espais, auquel sont attachés les cercles exterieurs avec le Pole Austral du Zodiaque; dans icelui est fiché un aissieu rond tendant en bas par le pied qui passe, & par le rondeau mobile. A cest aissieu sous le rondeau mobile est attaché une petite rouë, qui tourne avec lui & avec la Sphere. Au milieu de la cavité du rondeau immobile, il y a une semblable petite rouë attachée à la croix, & entre ces deux encor une troisiéme mise sous le rondeau mobile, de telle sorte qu'autour du clou du mobile, elle touche de ses dents les dents de la rouë qui est au milieu du rondeau immobile, & de l'autre rouë qui est attachée au petit aissieu sur lequel est posée la Sphere. Quand donc le rondeau mobile est tourné sur l'immobile d'Occident en Orient, la terre fait aussi une double revolution; car avec le rondeau mobile elle est emportée de lieu en lieu autour du Soleil par tous les signes du Zodiaque exterieur d'Occident en Orient vers un costé; & cependant par le moyen de ces trois rouës elle fait aussi un tour en son lieu autour d'un petit aissieu (allant au travers du rondeau mobile en parallel avec l'aissieu du Zodiaque) d'Orient en Occident, vers l'autre costé. Ou bien, afin de parler plus proprement, par l'operation de ces trois rouës, elle est retenuë avec son aissieu tousjours tournée vers une mesme contrée du monde (comme ne se souciant point de son mouvement autour du Soleil) tout de mesme que l'indice en la rose |
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du quadran de mer, qui, estant posé sur l'aiguille frottée d'aimant, regarde tousjours le Septentrion, en quelque façon qu'il soit emporté avec le quadran dans lequel il est enfermé. Au bord du rondeau mobile, vis à vis de la Sphere, il y a un indice de bois, qui en tournant le rondeau peut estre mis sur tous les jours de l'an qui sont au Calendrier. [fig.] Que si ceste construction de la Sphere semble absurde à quelcun, comme ne s'accordant pas avec ce qui est vrayement en la nature; Premierement, pource qu'il y a ici deux Zodiaques, l'un ayant pour centre le Soleil, l'autre la terre, combien qu'en effect il n'y en ait qu'un au ciel. Secondement, pource que le Soleil y est hors de la Sphere des estoiles fixes, combien qu'en verité il soit enclos dedans. Tiercement, pource que la Sphere des estoiles fixes est emportée avec la terre autour du Soleil, combien toutesfois qu'elle est immobile & a le Soleil en son centre. Ie lui respond. Au premier chef, pource que, par la description du chapitre second, le diametre de la grand Sphere de la terre est insensible & comme un poinct au regard de la distance des estoiles fixes, & pourtant que c'est une chose indifferente si le Zodiaque est descrit du Soleil ou bien de la terre comme centre; qu'il faut concevoir en son entendement que l'un & l'autre Zodiaque (tant celui qui est descrit à l'entour du Soleil, que celui qui est descrit à l'entour de la terre) a une telle estenduë autour du Soleil, qu'au regard du chemin que tient le Globe de la terre, il n'y a aucune difference sensible, qui empesche qu'on ne die qu'ils s'accordent en tout & par tout, & ne sont qu'un seul cercle. Au second je di, pource qu'il nous est impossible de suspendre librement aucun corps en l'air, sans avoir quelque chose qui le soustienne, comme en effect le Soleil, la terre & autres corps celestes sont suspendus; il faut tenir ici une autre procedure pour exprimer nos conceptions. Le Soleil ne peut estre suspendu |
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librement dans ceste Sphere, ni aussi appuyé sur quelque chose que cela n'empesche le mouvement des cercles de la Sphere. Et pource qu'en nostre veuë on n'apperçoit aucune difference au regard du Soleil, qui nuise à l'usage de ces Spheres, tant en l'ascension qu'en la descente du Soleil, & choses qui en dependent, soit qu'il soit plus esloigné de nous qu'il n'est en verité, mesme qu'il soit hors de la Sphere des estoiles fixes, il peut aussi estre mis hors d'icelle sans que cela nous apporte aucun empeschement à exprimer nos conceptions; tout de mesme qu'és Globes celestes vulgaires, l'Horizon est colloqué hors du ciel des estoiles fixes, lequel toutefois nous devons nous imaginer qu'il est au dedans. Au troisiéme, puis que nous concevons en nostre entendement, que ces deux Zodiaques, & par consequent la Sphere des estoiles fixes qui est jointe à l'interieur, ont une si ample estenduë autour du Soleil, que le diametre du chemin de la terre est insensible & comme un rien à son regard; qu'il s'ensuit à l'opposite, qu'un espace esgal au diametre du chemin de la terre en la Sphere des estoiles fixes, ne se peut aussi observer au Globe de la terre & n'est presque rien; & pourtant que tout revient à un, soit que nous posions que le ciel des estoiles fixes se repose entierement, soit que nous disions qu'il tourne avec la terre sur un cercle qu'on ne sçauroit appercevoir.
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& que le Soleil ne s'arreste autour de l'Ecliptique. Toutesfois si quelcun de peur d'estre contraint d'achever toute la conversion, veut faire retourner l'indice en arriere, il le doit pousser à tout le moins 10 ou 12 degrés au de là du lieu qu'il cherche, & derechef l'avancer d'Occident en Orient, jusqu'à ce que la Sphere & l'Ecliptique recouvrent derechef leur mouvement autour de l'Ecliptique. Quand il est dit qu'il faut mettre quelque chose au Meridien ou au Colure, ou qu'il en faut commencer à conter quelque chose, il le faut entendre de leur milieu, où ils sont divisés en degrés. Mais quand il est commandé de faire le mesme és cercles des longitudes, au vertical & en l'Ecliptique, il le faut prendre de leurs bords distingué en degrés; ce dont nous avons estimé qu'il falloit devant toutes choses advertir une fois, de peur d'estre contraint d'en faire à diverses fois une nouvelle declaration. |
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La seconde, des quadrans Solaires. Problemes de la premiere parties. |
I. | Des diverses positions de la Sphere. | 207 | ||
II. | Que l'elevation du Pole est esgale à la latitude des lieux, & qu'avec la hauteur de l'Equateur elle fait 90 degrés. | 208 | ||
III. | Trouver | La longitude & latitude des lieux au globe terrestre. Les lieux en la terre dont on sçait la longitude & latitude. La distance de deux lieux en la terre. Certain lieu estant donné, la situation des autres au regard de l'angle de position. Les lieux des Perioeciens, Antoeciens & Antipodes en la terre. | 209 | |
IV. | Trouver combien de lieuës fait chasque endroit de la terre, d'Occident en Orient dans un certain temps donné. | 209 | ||
V. | Trouver le lieu du Soleil en l'Ecliptique chasque jour de l'année. | 212 | ||
VI. | Poser la terre en son lieu qu'elle a au ciel, & le Soleil au lieu de l'Ecliptique opposite à celui auquel il semble de la terre, qu'il soit, à un certain temps donné. | 212 | ||
VII. | Combien de lieuës fait le globe de la terre se montant autour du Soleil, dans un certain temps donné. | 213 | ||
VIII. | Trouver en l'Ecliptique les lieux des estoiles fixes. | 214 | ||
IX. | Trouver la declinaison du Soleil en tout temps de l'année. | 215 | ||
X. | Trouver la declinaison des estoiles fixes. | 216 | ||
XI. | Observer l'elevation du Pole sur l'horizon par le moyen des estoiles qui sont à l'entour du Pole. | 216 | ||
XII. | Trouver l'elevation du Pole par les estoiles qui sont proches de l'Equinoctial. | 217 | ||
XIII. | Observer la mesme elevation par le Soleil. | 218 | ||
XIV. | Trouver à un certain temps donné les endroits des Ascensions & descensions du Soleil & des estoiles fixes, en l'horizon. | 219 | ||
XV. | Trouver l'ascension droite du Soleil & des estoiles fixes. | 221 | ||
XVI. | Trouver l'ascension & descension oblique du Soleil & des estoiles fixes. | 222 |
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XVII. | Trouver le degré de l'Ecliptique qui passe avec les estoiles par le meridien, ou qui monte sur l'horizon en la Sphere droite. | 223 |
XVIII. | Trouver avec quel degré de l'Ecliptique chasque estoile se leve ou se couche en la Sphere oblique. | 223 |
XIX. | Trouver l'heure du lever & du coucher du Soleil à un certain temps de l'année, & quelque latitude que ce soit. | 224 |
XX. | Trouver la longueur des jours & des nuicts en quelque lieu & temps que ce soit. | 225 |
XXI. | Trouver l'heure du lever & coucher de quelque estoile en tout temps, & en quelque latitudes de lieux que ce soit. | 225 |
XXII. | Trouver à une latitude donnée quelles estoiles ne se levent ou ne se couchent jamais; Item celles qui touchent l'horizon sans se lever ou se coucher, & quelles sont celles qui passent par le Zenith. | 226 |
XXIII. | Trouver la difference de temps entre le lever ou le coucher de deux estoiles ou de deux signes celestes, à quelque latitude que ce soit. | 227 |
XXIV. | Trouver le commencement & la fin du crepuscule du matin & du soir en tous lieux & temps. | 228 |
XXV. | Trouver le triple lever & coucher des estoiles, Cosmique, Acronyche & Heliaque. | 229 |
XXVI. | Trouver en tout temps l'Azimuth du Soleil. | 231 |
XXVII. | Trouver l'Azimuth des estoiles. | 232 |
XXVIII. | Trouver les Almucantaraths ou cercles de hauteur du Soleil. | 233 |
XXIX. | Trouver en tout temps la hauteur des estoiles sur l'horizon. | 234 |
XXX. | Dresser en tout temps la Sphere selon la situation du ciel. | 235 |
XXXI. | Cognoistre les estoiles au ciel par le moyen de la Sphere. | 237 |
XXXII. | Trouver en la Sphere la longitude & latitude des estoiles. | 237 |
XXXIII. | Trouver en tout temps l'Azimuth du Soleil & l'heure du jour, par la hauteur du Soleil donnée. | 238 |
XXXIV. | Trouver la hauteur du Soleil sur l'horizon & l'heure du jour par l'Azimuth du Soleil donnée. | 238 |
XXXV. | Trouver l'Azimuth des estoiles & l'heure de la nuict par la hauteur des estoiles donnée. | 239 |
XXXVI. | Trouver la hauteur des estoiles & l'heure de la nuict par l'Azimuth des estoiles cognuë. | 240 |
XXXVII. | Trouver l'heure de la nuict par deux estoiles qui sont en un mesme Azimuth. | 240 |
XXXVIII. | Trouver l'heure de la nuict par le lever & coucher des estoiles. | 241 |
XXXIX. | Trouver en tout temps les hauteurs & Azimuths du Soleil & des estoiles à toutes heures du jour. | 242 |
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XL. | Trouver en tout temps la difference du temps entre deux lieux de la terre, & quelle heure il est és autres païs. | 243 |
XLI. | Trouver quelle heure il est au lieu de nostre demeure, quand le Soleil ou les estoiles se levent ou se couchent en d'autres lieux, ou sont eslevés à certaine hauteur sur l'horizon. | 244 |
XLII. | Trouver par le Soleil les heures d'Italie. | 245 |
XLIII. | Trouver les heures d'Italie par les estoiles fixes. | 246 |
XLIV. | Trouver les heures contées dés le lever du Soleil, comme celles de Nuremberg. | 246 |
XLV. | Trouver en tout temps les heurres inesgales, qu'on appelle Planetaires, tant du jour que de la nuict. | 247 |
XLVI. | Trouver un lieu en la terre, qui ait le Soleil au zenith, en un certain temps donné. | 249 |
XLVII. | Trouver en tout temps quel lieu de la terre touche à l'horizon en se levant ou en se couchant. | 250 |
XLVIII. | Trouver en tout temps par les rayons du Soleil en quels lieux de la terre le Soleil est à l'horizon tant en se levant qu'en se couchant. | 251 |
XLIX. | Trouver en combien de divers lieux tant d'une mesme longitude & latitude que de diverse, le Soleil en un certain temps donné est esgalement haut sur l'horizon. | 251 |
L. | Colloquer les Planetes en la Sphere à un certain temps donné, & par ce moyen apprendre à les cognoistre. | 252 |
LI. | Dresser avec la Sphere les douze maisons du ciel. | 252 |
LII. | De la precession des equinoxes, par le moyen de laquelle il semble que les estoiles changent leur longitude. | 255 |
Problemes de la Seconde partie. | ||
LIII. | Trouver le vray Septentrion & Midi. | 258 |
LIV. | Trouver la declinaison de l'aiguille marine du Septentrion. | 260 |
LV. | Descrire un quadran Horizontal. | 260 |
LVI. | Descrire un quadran vertical Meridional. | 262 |
LVII. | Tracer un vertical direct Septentrional. | 263 |
LVIII. | Descrire des verticaux directs par le moyen des horizontaux. | 263 |
LIX. | Tracer des verticaux declinans du midi. | 263 |
LX. | Descrire des verticaux declinans du Septentrion. | 266 |
LXI. | Descrire des verticaux declinans par le moyen d'un horizontal. | 266 |
LXII. | Tracer des declinans reclinés. | 269 |
LXIII. | Tracer des declinans enclinés. | 272 |
LXIV. | Descrire des declinans Septentrionaux reclinés & enclinés. | 274 |
LXV. | Descrire des declinans reclinés par le moyen d'un horizontal. | 274 |
LXVI. | Descrire, des declinans enclinés par le moyen d'un horizontal. | 275 |
LXVII. | Tracer des quadrans equinoctiaux. | 276 |
LXVIII. | Tracer des quadrans Meridiens & Polaires. | 277 |
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