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[ 341 ] [ v ]

Que penser de Dieu?

[1686 et 1687?]

Voyez les notes qui suivent.


§ 1.   Les paiens et barbares attribuoient à Dieu un corps semblable au corps humain, les philosophes luy attribuent une ame semblable a l'ame humaine et des affections semblables aux nostres, seulement differentes en perfection. Ils luy donnent une maniere de penser, de vouloir, d'entendre, d'aimer. Que pouvaient-ils faire autre chose? Avouer qu'il surpasse de bien loin l'homme d'avoir une idée de Dieu.


§ 2.   C'est une imperfection, dit des Cartes, d'estre divisible; pour prouver que Dieu n'est point estendu*). C'est une pauvre raison, car pourquoy est ce là une imperfection?

  Il est, dit-il, de la nature de l'infini de ne pouvoir estre compris par nous qui sommes finis°). Ce ne sont que des paroles. Qu'est ce a dire que nous sommes finis? car il ne parle encore que de nostre ame ou pensee. Cela ne peut rien signifier sinon que nostre ame ne comprend point l'infini, et que pour cela elle ne le comprend point.


  *)  Cf. 'Discours 4': "ce ne pouvait être une perfection en Dieu d'être composé de ces deux natures".
'Principia philosophiae' I.XXIII: "Ita in naturâ corporeâ, quia simul cum locali extensione divisibilitas includitur, estque imperfectio esse divisibilem, certum est, Deum non esse corpus."
  °)  Ibid. XVIII.

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  Cherchons a prouver qu'il y a un autheur summe intelligens, mais d'une intelligence tout a fait autre que la nostre, non pas par ces idees, mais par la consideration des choses creees, ou il parait tant de art et de prudence, sur tout en ce qui regarde les animaux*).
  [ *)  Cf. 'De l'oeil et de la vision'.]



§ 3.   Le doute fait peine a l'esprit. C'est pourquoy tout le monde se range volontiers a l'opinion de ceux qui pretendent avoir trouvè la certitude. jusques la qu'ils aiment mieux les suivre en se laissant abuser.

  Il ne faut pas croire sans qu'on ait raison de croire; autrement que ne croit on les fables et les comptes [sic] des vieilles, et pourquoy les Turcs n'ont ils point raison de croire à l'Alcoran?

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§ 4.   Quod si ad causas tantarum rerum investigandas exspatiari libeat qu'il s'offre une quantitè de belles speculations. Quid Planetas ad solem adduxerit. Quomodo corpora globosa effecta fuerint. Pourquoy les tourbillons qui portent les lunes aillent du mesme sens que le grand tourbillon. Pourquoy l'axe de la terre et Saturne sont inclinez au plan de leur orbites.

  Que quoyque Dieu ait ainsi disposè ces choses, pourtant il est certain qu'il agit par les loix immuables de la nature, et qu'il est autant permis de rechercher dans ce bastiment du monde la suite et l'efficace des causes naturelles que dans la production du flus et reflus de la mer, du tonnerre, de l'arc en ciel et autres choses de cette sorte. [>]



§ 5.   Le Roy Alphonse est accusè d'avoir dit qu'il auroit pu donner de bons avis a Dieu, touchant l'ordre et la disposition des Orbes Celestes. Je crois qu'il a voulu dire; voiant les absurditez et les embaras de toutes ces spheres solides et excentriques dans le systeme de nos Astrologues Juifs et Arabes; que ce n'estoit pas là la veritable constitution de l'univers, ni un ouvrage digne de la divine sagesse. Car quelle apparence qu'il se soit vantè de pouvoir corriger le vray ouvrage de Dieu!




  § 1, 2:   Chartae astronomicae [HUG 28], f. 124 [De rationi impervijs, App.]. La feuille n'est pas datée; mais comme Huygens y dit que "Saturne .... suit le mouvement de la matiere [du tourbillon]" les §§ 1 et 2 ne peuvent pas être postérieurs à 1687 [...].

  § 3:   Chartae astronomicae, f. 128 [De rationi impervijs, App.]. Feuille sans date.

  § 4:   Chartae astronomicae, f. 194 [Pensees meslees]. Ce que Huygens dit ici sur les tourbillons indique qu'en ce moment il croit encore aux vortices deferentes. La f. 194 citée n'est donc pas postérieure à 1687 puisque les "Principia" de Newton de cette année l'amenèrent à concevoir les tourbillons autrement. [...]

  § 5:   Chartae astronomicae, f. 122. Cette feuille n'est pas datée. Elle est de 1687 au plus tôt puisqu'elle contient aussi les mots: "Tourbillons detruits par Newton" etc. [...] Dans cette feuille il est en outre question de la "Pluralité des mondes", c.à.d. du Traité de Fontenelle [...] publié en 1686.




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